Chez Hop’Toys nous avons récemment lu le livre d’Anne-Sophie Ferry, Le Royaume de Tristan. Nous l’avons lu avec beaucoup de compréhension et d’empathie. Suite à cette lecture, nous avons souhaité partir à sa rencontre afin d’en savoir plus sur son histoire mais aussi les méthodes comportementalistes pour sensibiliser mais aussi apporter des réponses à notre communauté.
Pour approfondir un maximum ces sujets intéressants nous avons décidé de couper l’interview en 3 parties distinctes qui correspondront à 3 articles sur notre blog. Voici la dernière partie !
Avant de débuter cet article nous souhaitons remercier Anne-Sophie Ferry qui a pris le temps de répondre à toutes nos questions de la manière la plus complète possible. Encore Merci !
Qu’en est-il aujourd’hui en France concernant l’autisme ? Il y a-t-il des évolutions ? Les méthodes comportementales sont-elles reconnues ?
Il existe une dichotomie absurde unique dans notre pays.
Pour résumer car le chantier est très, très vaste, la Haute Autorité de Santé proscrit la psychanalyse comme traitement de l’autisme, et préconise les approches comportementales. C’est donc plus que reconnu, d’ailleurs l’ONU a épinglé 5 fois la France à ce sujet. C’est ici qu’apparaît le paradoxe: la France croule sous les plaintes du conseil européen, se ridiculise au niveau mondial, mais si vous entrez dans un hôpital de jour et posez la question au chef de service: personne n’est au courant, tout va bien, l’autisme en France c’est super…
J’ai reçu un grand nombre de messages après la sortie du livre, de professionnels « de terrain » – éducateurs, psychologues, infirmiers, AVS, etc ….ils se battent pour recevoir ces formations, afin de faire mieux vivre les enfants en instituts, afin d’avoir les techniques pour leur transmettre des apprentissages. Mais une hiérarchie et des collègues réfractaires préfèrent travailler « à l’ancienne mode », ce qui paralyse toute évolution possible des prises en charges. Il y aurait tant à dire sur ce propos, que je recommande la lecture du livre, « AUTIME: LA GRANDE ENQUETE », de Florent Chapel, où tout est expliqué.
Heureusement, il y a une évolution » parallèle » avec beaucoup d’instituts aux « normes » qui ouvrent et qu’on appelle « expérimentaux » alors que ces pratiques existent depuis 50 ans dans le monde (!) , mais il n’y a pas assez de place : des centaines de milliers d’enfants attendent encore, ballottés entre des diagnostics contradictoires et des prises en charges sans effet. A part ces exceptions, on ne constate aucune formation correcte ni pratiques adaptées dans les instituts » traditionnels » du secteur public. Hélas, au lieu d’y avoir une cohérence interprofessionnelle et dans toute la France, des familles se perdent dans le labyrinthe : le secteur public avec le clan psychanalytique et pluridisciplinaire qui tentent timidement quelques approches de tous bords- sans résultats probants – et le comportemental, non remboursé, donc parfois inaccessible.
Quels conseils donneriez-vous aux parents d’enfants porteurs de troubles autistiques ?
D’abord je leur conseillerais de se rapprocher très rapidement des CRA ( centres ressource autisme ), car c’est ici qu’ils auront accès aux protocoles aux normes pour les diagnostics corrects. C’est là qu’ils seront conseillés: par exemple c’est le CRA de Bordeaux qui m’a conseillé les approches comportementales. Ensuite, je conseille qu’ils prennent contact avec une association Autisme de leur région, normalement ils seront guidés. Il pourront être aidés pour effectuer des démarches auprès de la MDPH afin d’ avoir des financements, puisque l’ABA n’est toujours pas remboursé. Et s’ils le peuvent, s’ils sont dans une région qui le permet, s’entourer de professionnels qualifiés.
Je leur conseille ensuite de suivre des formations ABA ( idéalement à Lille 3, mais sinon auprès de professionnels certifiés ) comme je le disais précédemment, afin de comprendre mieux leur enfant et sa prise en charge.
Par contre, je ne conseille à personne de faire comme moi: être seule thérapeute est juste un pis aller. De plus, l’enfant ne généralise pas ce qu’il a appris, mais bien sûr si on n’a aucun financement pour les prises en charges en libéral, on n’a pas le choix, c’est mieux que rien.
En priorité, je donnerai le meilleur conseil que l’on nous a transmis à Lille 3: toujours croire dans les capacités de l’enfant aussi handicapé soit il. Avec un très bon travail, on découvre souvent des ressources surprenantes. Donc, toujours travailler en gardant à l’esprit les progrès qu’il va faire et en ayant confiance dans l’enfant.
Une question nous brûle les lèvres : aujourd’hui comment va Tristan ?
Aujourd’hui Tristan va bien, mais il pourrait aller mieux s’il n’avait pas si peu d’heures de prise en charge faute de moyens ( 2h/semaine et 4h de trajet); il progresse lentement, au niveau du langage il échange parfois très bien, il commence à lire et à comprendre de plus en plus de concepts abstraits et de situations entre les personnes. Mais avec son père nous rêvons qu’un jour il bénéficie d’une équipe tous les jours pour me relayer et lui apprendre à vivre, faire du sport, retourner à l’école, etc…
Reste à espérer que la France nous donnera un jour les moyens de faire progresser Tristan.
Je vous remercie beaucoup de m’avoir permis de parler de Tristan et de la situation de l’autisme en France. Merci à toute l’équipe de Hop Toys 🙂