À l’occasion de la Journée européenne de la psychomotricité, ce dimanche 19 septembre, nous avons souhaité vous permettre de mieux connaître le métier de psychomotricien que l’on a parfois du mal à cerner. Il est vrai que la psychomotricité est une thérapie aux multiples facettes, qui prend à la fois en compte le corps, le psychisme et l’affectif et amène les psychomotriciens à utiliser de nombreuses ressources, de nombreuses techniques pour traiter les troubles psychiques liés à des troubles corporels… et inversement. On a donc demandé à une psychomotricienne, Karine Caselles, également thérapeute en intégration sensorielle dans le Rhône, de vous parler de son métier.
La psychomotricité : le corps et l’esprit
Rappelons d’abord avec Aurélien D’Ignazio et Juliette Martin, auteurs du livre 100 idées pour développer la psychomotricité des enfants, la définition du terme « psychomotricité », un terme riche puisqu’il est utilisé comme concept ET comme discipline professionnelle.
Par ailleurs, le mot psychomotricité est composé de la partie « psycho » qui comprend les sphères cognitive et psycho-affective et de la partie « motricité » qui comprend ce qui a trait au mouvement. Pour Aurélien D’Ignazio et Juliette Martin, le soin psychomoteur et le challenge du travail thérapeutique du psychomotricien sont de relier les trois sphères.
La psychomotricité racontée par une psychomotricienne
Je suis psychomotricienne et je vais vous parler de mon métier, que j’envisage chaque jour comme une véritable aventure humaine.
J’ai été diplômée de l’école de Lyon en 1998. Imaginez qu’à l’époque, nous ne parlions pas de dyspraxie, dysgraphie, dys… quoi ? Sont maintenant ajoutés au cursus des études, les neurosciences, les fonctions exécutives, et tout dernièrement, les grands principes de l’Intégration Sensorielle. Il faut vivre avec son temps ! Dans notre métier de psychomotricien, les indications sont multiples : rééducation du graphisme, troubles de l’équilibre, des coordinations, du schéma corporel, du tonus et de la relation…. Il faut sans cesse aller à la découverte des dernières études, des acronymes parfois farfelus, ou des syndromes, aussi divers que variés.
>> À lire : « Les études de psychomotricien »
« Être psychomotricienne, c’est avant tout jongler ».
Jongler avec le subtil équilibre à trouver entre nos connaissances théoriques, bien ancrées, et les nouvelles données scientifiques. Mais c’est aussi faire la part belle à nos émotions, nos intuitions, c‘est dépasser nos craintes de ne pas être sur la bonne piste, c’est oser l’audace d’une nouvelle hypothèse….
Être psychomotricien, c’est aussi être un peu acrobate. C’est recevoir un tout petit patient porteur d’un trouble génétique, puis un adolescent perdu dans ses difficultés sensorielles, et ensuite encore, un tout autre patient qui a « une moche écriture ».
Je dirais que pour être psychomotricien, il faut être créatif, inventif, mais attention, toujours ajusté !
Je pratique en cabinet libéral à Belleville sur Saône depuis 15 ans. Il m’a fallu pour faire mes gammes, découvrir une partie du large éventail que constitue notre patientèle. Les indications sont multiples : rééducation du graphisme, troubles de l’équilibre, des coordinations, du schéma corporel, du tonus et de la relation…
Il faut sans cesse aller à la découverte des dernières études, des acronymes parfois farfelus, ou des syndromes aussi divers que variés.
En RAM : éveil corporel, dépistage, formation et sensibilisation aux préférences sensorielles
Je suis intervenue en Relais d’Assistantes Maternelles durant 8 ans. En RAM, une psychomotricienne peut proposer des séances de groupe à l’éveil corporel chez le tout petit. Nous mettons en place des parcours, des ateliers moteurs libres, où chaque enfant peut à sa guise explorer son corps, tester la prise de risques dans des activités motrices plus ou moins hasardeuses, mais aussi les principales fonctions fondamentales au développement psychomoteur : l’espace, en montant DESSUS (je me hisse fort), en passant DESSOUS (aïe ma tête !), en roulant pour se retrouver DE L’AUTRE COTE du tunnel, en rampant…
Ce sont de plus des moments partagés avec leur nounou, qui prend le temps de se poser et d’observer. En RAM, le psychomotricien a un rôle fondamental dans le dépistage précoce des troubles psychomoteurs, mais elle pose aussi un œil avisé sur d’éventuelles difficultés relationnelles, ou des désordres dans le système de communication.
Je proposais également aux assistantes maternelles un temps « de formation » : Quelles sont les étapes clés du développement psychomoteur du petit enfant ?
En tant que psychomotricien, nous soulignons l’importance du passage par le 4 pattes, qui est une étape constructive majeure, car elle permet de mettre en place les coordinations/dissociations qui lui serviront dans ses futures manipulations, à l’école, pour l’habillage….. Lorsque l’enfant zappe cette étape, nous nous posons la question de sa fragilité à mettre en œuvre ce système d’organisation corporelle.
Nous portons également un grand intérêt aux transitions de positions chez le tout petit : comment passer de la position assise à 4 pattes, comment s’asseoir depuis la position à plat ventre… Il ne s’agit pas de « faire à la place de l’enfant » mais bien de l’accompagner dans ces étapes, de le guider et de lui montrer le chemin, chemin vers son autonomie motrice et psychique. Car n’oublions pas que ces 2 concepts sont étroitement en lien.
>> À lire : Comment développer la psychomotricité des enfants ?
Initiation à l’Intégration sensorielle pour mieux comprendre l’enfant
Enfin, durant cette belle expérience auprès des petits, je proposais aux assistantes maternelles une initiation à l’Intégration sensorielle. Nombreuses étaient (et sont encore) les assistantes maternelles à se poser des questions sur l’attitude d’un enfant : pourquoi crie-t-il autant ? On dirait qu’il crie par plaisir…
Il était alors proposé un temps d’expérimentations sensorielles, par petit groupe d’adultes. Quelle surprise alors ! J’aime ce que déteste ma voisine ? Mais comment fait-elle pour aimer les brossages, si désagréables ? Et pourquoi cette réaction vive quand j’appose des vibrations sous ses pieds ?? Oui, dans cet atelier d’adultes, nous découvrions que chacune était différente, et que tout le monde s’en portait bien. Alors, ne serait-ce pas de même pour les enfants ? Bien entendu !
Accepter cette différence dans nos préférences sensorielles et dans nos ressentis, est une étape primordiale pour aller à la rencontre de l’autre.
>> À lire : Découvrir l’intégration sensorielle
>> À découvrir : notre dossier sur les troubles de la modulation sensorielle
Le travail en Institut Thérapeutique, Éducatif et Pédagogique : découvrir son corps, ses limites, son image
J’interviens depuis plusieurs années dans un Institut Thérapeutique, Éducatif et Pédagogique (ITEP) proche de mon cabinet. J’y rencontre de jeunes adolescents, et le travail fait y est passionnant. Il s’agit, entre autres bien sûr, de découvrir son corps, ses limites, son image. Certains jeunes peuvent porter les stigmates d’un passé douloureux dans la petite enfance.
Il est un exercice psychomoteur que j’aime tout particulièrement : je propose à mon patient, de réaliser au sol, une silhouette (Avec du matériel choisi : des cordes, des bâtonnets, de petit cerceaux, de petites balles). Il doit tracer sa silhouette – du moins celle qu’il pense être la plus juste possible, et sans triche (Pas le droit de mesurer la longueur des bras, ni de se coucher par terre pour vérifier). Mais attention, lorsque tu auras terminé, tu te coucheras dedans et il faudra qu’elle soit la plus ajustée possible !
Eh bien… pas si simple…..mais très riche en enseignements ! « Ensuite, tu t’allongeras par terre, à côté, et je tracerai ton véritable contour ». Nous visualiserons la différence entre le corps imaginé, vécu et perçu, et le corps « réel ».
Au cabinet : des enfants de tous âges et de tous horizons
Au cabinet, j’ai cette chance de recevoir des enfants de tous âges et de tous horizons : je rencontre des bébés, et les séances se font en présence de la maman, qui est aux premières loges pour assister à des moments magiques parfois.
Il y a parfois ces moments de grâce, où le bébé regarde sa maman de ce regard que tout le monde attendait, où il fait son premier 4 pattes….
Je rencontre également des enfants en difficultés scolaires. Nous mettons en place des séances ludiques, où tout le monde travaille sans s’en rendre compte. L’enfant gagne sa partie de golf, la psychomotricienne quant à elle étudie la posture et les appuis et se demande comment aller plus loin dans le progrès à la séance prochaine….
L’intégration sensorielle : une nouvelle facette du soin psychomoteur
Au-delà du plaisir que me procure mon métier, je suis soucieuse de progresser dans mes connaissances. Je désire évoluer dans mes interventions.
Il y a 4 ans, je me suis formée à la thérapie par l’intégration sensorielle, à Marseille, auprès de SENSOTED. Je découvre une nouvelle facette du soin psychomoteur. Je considère avoir aujourd’hui 2 métiers, car ce sont 2 supports totalement différents mais tellement complémentaires et cohérents. Après l’élaboration d’un profil sensoriel de DUNN, vient la phase complexe du décorticage des réponses, qui me permettra de comprendre le fonctionnement sensoriel de l’enfant, puis de mettre en éclairage ses attitudes et ses réponses comportementales. La restitution ensuite aux parents est précieuse, et j’entends souvent « Mais voilà pourquoi il se balance sans cesse… pourquoi il refuse mes plats… ».
Lorsque le soin démarre, j’établis un protocole thérapeutique. C’est un véritable plan d’action, qui permettra à l’enfant, du plus qu’il est possible, de cheminer vers un mieux-être sensoriel dans notre environnement parfois si agressif et si chargé en stimulations.
>> À télécharger : notre livre blanc « En savoir plus sur l’Intégration sensorielle »
Du matériel pour enrichir sa pratique
Aujourd’hui, il existe une multitude de matériel adapté, qui apporte une parenthèse enchantée dans nos séances. J’utilise beaucoup la toupie (la mienne est orange !), ou la planche à roulettes pour travailler le système vestibulaire, la mousse crépitante pour le sensitif (les enfants adorent), ou les ballons lestés….. Je suis contente de trouver facilement des brosses sensorielles, et je peux maintenant conseiller aux familles de pratiquer certains protocoles sensoriels à la maison.
>> À lire : Protocole Wilbarger, le témoignage d’une maman
La diversité et la richesse du matériel proposé sont une vraie aubaine et elles enrichissent ma pratique. Des idées nouvelles pointent au fil des pages et me donnent l’envie de partir encore à l’aventure… avec mes patients !
Nous remercions vivement à Karine Caselles ! À tous les psychomotriciennes et psychomotriciens, Hop’Toys souhaite une belle Journée européenne. Et pour mieux faire comprendre votre riche et passionnant métier, téléchargez notre infographie ! À afficher et partager sans modération pour faire naître des vocations et comprendre tout ce que cette approche peut apporter.
Publié le 19 septembre 2020 – Mise à jour le 17 septembre 2021
Bonjour, pourrai je avoir vos coordonnées pour échanger (dans le cadre de ma reconversion professionnelle).
Dans l’attente de votre retour.
Cordialement