Sur cette question difficile, il y a deux sons de cloches. D’un côté, nous avons les défenseurs de la tradition et de la magie de Noël. De l’autre, ceux qui pensent qu’il vaut mieux ne pas laisser croire les enfants au Père Noël. Alors, quel comportement adopter face à son enfant, notamment avec son enfant TSA ? Doit-on lui faire croire au père Noël ou lui dire la vérité ? On pèse le pour et le contre.
Les origines du père Noël : un mythe assez récent
Nous n’avons pas toujours fêté Noël ainsi. En réalité, le Père Noël tel qu’on le connaît aujourd’hui est une construction qui date de la seconde moitié du XIXe siècle.
Le mythe du Père Noël s’inspire de l’histoire d’un saint, Saint Nicolas, qui était célébré début décembre. Sa fête était très populaire dans de nombreux pays chrétiens. Lors de cette fête religieuse, on donnait des friandises et des cadeaux aux enfants qui avaient été sages pendant l’année.
Au cours du XIXe siècle puis du XXe siècle, cette tradition a évolué. C’est grâce à la presse, à des contes, des nouvelles et des illustrations publiées durant cette période que le père Noël remplace progressivement Saint-Nicolas. Il acquiert ses rennes, son traîneau, se faufile à travers la cheminée la nuit du 24 décembre. Voilà, le mythe du Père Noël est né !
Par la suite, des campagnes marketing régulières au moment des fêtes, notamment celles de la firme de boissons sucrées, ont figé les traits caractéristiques du père Noël et l’ont popularisé à travers le monde.
Pour en savoir plus, Le Monde a édité une vidéo qui retrace l’origine du Père Noël.
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Le Père Noël, une tradition ancrée qui fait le bonheur des enfants et des adultes
Chaque parent décide en temps et en heure comment adapter le mythe aux usages familiaux. Cependant, pour beaucoup de familles, le Père Noël est un élément constitutif des fêtes, une tradition bien ancrée.
Il faut être conscient qu’on vit dans une société où la majorité des familles fêtent Noël. Le Père Noël est partout : à la télé, dans les publicités sur internet, sur les packagings des jouets et friandises, dans les magasins. L’enfant va donc naturellement poser des questions et confronter ce qui se passe chez lui à ce qu’il entend et voit à l’extérieur.
Dans ce contexte, il est souvent plus facile pour les parents de faire perdurer cette tradition plutôt que de révéler à leur enfant que le Père Noël n’existe pas.
Parmi les arguments mis en avant, la plupart des parents qui laissent croire leur enfant au Père Noël admet qu’il s’agit d’une tradition innocente. Les contes font partie du folklore de Noël.
Enlever le Père Noël, ce serait comme déposséder Noël d’une partie de ses traditions.
D’ailleurs, la plupart des enfants, – autistes ou non –, apprécient les fêtes de fin d’années et les rituels qui y sont associés. Eux aussi attendent impatiemment la venue du Père Noël la nuit du 24 décembre.
En grandissant, les enfants finiront d’eux-mêmes par comprendre que le Père Noël n’existe pas… s’ils n’en sont pas informés par des camarades avant. Plus tard, ils se souviendront avec émotion de leurs souvenirs d’enfance. C’est ce qu’affirment les parents qui font croire leur enfant au Père Noël.
Laisser croire au Père Noël ! Est-ce bien de mentir à son enfant ?
Cependant, certains parents préfèrent ne pas laisser croire en l’existence du Père Noël, car selon eux, il s’agit d’une forme de mensonge ou de déformation de la réalité. Ils auraient la désagréable impression de profiter de la crédulité d’un enfant.
Les parents préfèrent privilégier d’autres traditions afin de faire vivre la magie de Noël sans avoir à mentir. Ils craignent également que leur enfant puisse leur en vouloir plus tard lors de la révélation.
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Certains enfants sont en effet très sensibles au mensonge, comme les enfants autistes. Leur façon de penser est souvent plus rigide et manichéenne qu’un enfant neurotypique du même âge. Du coup, l’enfant TSA pourrait se sentir trahi s’il découvrait que le Père Noël est une invention de ses parents.
Autre argument qui va dans le même sens : certains enfants avouent avoir peur du Père Noël ou ressentir du stress, notamment si leurs parents utilisent le Père Noël et les cadeaux pour faire du chantage. Dans ce cas, le mythe du Père Noël peut être vécu négativement.
Dans le cas d’un enfant autiste, on peut citer d’autres particularités, qui poussent à la réflexion.
Les enfants autistes peuvent ainsi avoir plus de mal qu’un enfant neurotypique à comprendre la séparation entre la fiction et la réalité. L’enfant peut encore croire au Père Noël à un âge tardif. Il risque d’être moqué par ses camarades. Certains parents prennent donc les devants en avouant que le Père Noël n’est qu’un personnage de fiction passé la petite enfance.
Enfin, d’autres parents pensent que la vérité aidera leur enfant autiste à gagner en autonomie. En effet, avec le mythe du Père Noël, l’enfant reçoit des cadeaux sans contrepartie. À partir du moment où le Père Noël disparaît, l’enfant prend conscience que les cadeaux sont un moyen pour ses proches de lui de montrer de l’affection.
Il doit à son tour penser aux cadeaux, participer à leur achat et à l’emballage. Il est alors plus impliqué dans Noël, il prend part à ses valeurs familiales de générosité, ce qui stimule son empathie.
Mon opinion sur le mythe du Père Noël en tant qu’adulte autiste
En tant que personne autiste, je me rappelle avoir vécu très positivement cette tradition lorsque j’étais enfant. Je croyais au Père Noël. J’étais excitée lorsque ma sœur et moi étions isolées dans notre chambre en attendant que le Père Noël dépose les cadeaux au pied du sapin.
Je ne crois pas avoir eu un comportement différent de celui de ma sœur. Peut-être ai-je été plus rapidement critique vis-à-vis du Père Noël. Je m’interrogeais beaucoup sur le fait qu’il puisse passer à travers la cheminée sans faire de bruit.
Quelle frustration lorsque mes parents me disaient que le Père Noël était parti cette année encore sans que je puisse l’apercevoir ! Cela me rendait un peu triste, mais la tristesse s’évaporait bien vite face aux cadeaux.
Le Père Noël, on en parlait finalement très peu dans l’année. Je n’y pensais qu’en constituant ma liste de cadeaux, puis le soir de la veille de Noël. Il ne s’agissait que d’une petite part de Noël, et certainement pas de la plus visible. Vu que je ne le voyais jamais, il s’agissait d’un concept théorique. Je n’avais pas une relation particulière avec le gros bonhomme barbu.
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C’est la raison pour laquelle je ne m’oppose pas spécialement à cette tradition. Elle me rappelle des souvenirs attendrissants. Je suis cependant persuadée que les enfants peuvent passer un très bon Noël en famille sans Père Noël.
Si chacun est libre d’avoir son avis, personne ne peut l’imposer aux autres. Le mieux est d’être à l’écoute de son enfant, de s’adapter à son mode de fonctionnement et aux usages dans votre famille pour faire en sorte que Noël soit un plaisir partagé.
Un choix à prendre en fonction de l’âge, de la sensibilité et de la personnalité de votre enfant autiste
L’année dernière, Hop’Toys a laissé la parole aux membres de sa communauté sur Facebook et a récolté de nombreux témoignages de parents sur leur façon de gérer la croyance au Père Noël de leur enfant.
Une majorité de parents d’enfants DYS ou autistes expliquent que leur enfant croit au Père Noël et adore ce moment de l’année. Ces derniers pensent qu’un peu de magie ne peut pas faire de mal à leur enfant extraordinaire.
D’ailleurs, ces parents soulignent qu’il s’agit d’un plaisir pour eux aussi : une maman admet que Noël n’a pas la même saveur lorsque les enfants comprennent que le Père Noël n’existe pas.
Les familles avec un enfant autiste trouvent des parades quand l’enfant grandit pour l’ouvrir aux autres et faire perdurer une partie de la magie de Noël.
D’autres familles ont pointé du doigt leur besoin d’adapter les traditions de Noël aux particularités de leurs enfants DYS et TSA.
Le mythe du Père Noël n’est finalement qu’un des nombreux aspects de Noël qui peuvent amener des difficultés : les décorations qui créent une surstimulation, les interactions sociales répétées et la perturbation de la routine de la famille sont autant de points problématiques. Les familles mettent donc en place des solutions pour transformer leur Noël et aider leur enfant à gérer ses émotions.
Article publié le 19 décembre 2022. Mis à jour le 13 décembre 2023.
Je m’appelle Clémence Guiot et je suis rédactrice web, mais aussi autiste. Je fais de la communication pour les entreprises et sensibilise aux questions de handicap sur les réseaux sociaux.