Adeline Michel est enseignante depuis 17 ans. Elle a fait la quasi-totalité de sa carrière dans l’enseignement spécialisé (d’abord dans une école de Plein Air, puis dans un dispositif ULIS-école). Nous l’avons invitée à vous apporter ici ses idées et retours d’expérience pour développer la coopération en classe flexible et inclusive.

Développer une école véritablement inclusive est un des enjeux majeurs des dernières décennies. En effet, en faisant le pari de l’éducabilité, en adaptant sa pédagogie à tous, en proposant des situations d’apprentissage centrées sur l’autonomie et l’initiative, les enseignants de cette école vont permettre à tous les élèves, porteurs de handicap ou non, de développer des comportements favorisant l’entraide, l’écoute, l’anticipation et l’esprit d’équipe. L’école est avant tout un lieu de vie. Un lieu où l’on apprend avec les autres, par ses interactions avec les autres. Choisir de travailler en classe flexible permet la construction d’un espace véritablement tourné vers l’autre et vers la coopération. 

La coopération, c’est quoi ?

Si un des objectifs affichés de l’école est l’accès à l’autonomie, ça ne signifie nullement pour l’élève qu’il doit tout faire seul, au contraire. Être autonome, c’est avant tout savoir prendre les bonnes décisions, pour soi comme pour le groupe. Le temps autonome n’est pas uniquement un moment de solitude. La classe flexible est par essence une classe coopérative, dans laquelle on ne reste pas seul face à ses difficultés, dans laquelle on œuvre ensemble à la construction de projets communs.

Coopération et entraide

Pour éviter qu’un enfant se retrouve seul face à ses difficultés, qu’il se retrouve en situation d’échec ou abandonne face à la tâche, il est important de proposer un cadre encourageant l’entraide et le tutorat. Ce type de pratique se révèle une des clés de l’école inclusive. Bien sûr, lorsqu’ils demanderont de l’aide, les enfants devront le faire en suivant des règles établies afin de garantir le respect du travail de chacun. Le demandeur ne doit pas interrompre son camarade à n’importe quel moment. Il faut savoir attendre, parfois quelques minutes, que l’autre soit disponible, sans le gêner.

À l’inverse, l’aidant doit apprendre à aiguiller sans donner les réponses, expliquer une méthode, afin qu’à l’avenir, son camarade sache faire seul. Autant de compétences que les élèves vont acquérir au fil du temps et qui profiteront tout autant à celui qui aide qu’à celui qui est aidé (la verbalisation, l’explicitation renforçant et affinant, on le sait, la compréhension d’une notion).

jeu de collaboration

>> À lire : « École inclusive conseil n°5 : la coopération »

Coopération et collaboration

Dans une classe coopérative, qu’elle soit flexible ou non, on a à cœur de proposer différentes situations où les élèves sont amenés à travailler en groupe. Cette forme de travail a bien sûr pour objectif de développer, entre autres, la coopération.
Mais tout travail de groupe est-il forcément synonyme de coopération ? Souvent, les élèves se répartissent ainsi les tâches dans le groupe : l’élève le plus performant sera celui qui fera le plus et l’élève le plus en difficulté étant celui qui en fera le moins. Risquer d’exclure ainsi un enfant porteur de troubles du groupe n’est évidemment pas l’objectif recherché ! Afin que la coopération prenne tout son sens, on veille donc à ce que chaque élève soit une partie indispensable du groupe, chacun ayant une part active à construire dans la résolution du problème ou dans la réalisation du projet commun. La réussite étant, dès lors, fortement liée à la condition de « faire ensemble », on peut choisir de proposer des activités aux formes diverses et dans des domaines d’apprentissages variés.

Quelques activités pour développer la coopération

Le jeu du parachute

Certainement une de mes activités favorites, notamment en début d’année pour construire la cohésion de groupe et favoriser les interactions.

jeu du parachute

>> À télécharger : « Jeu du parachute : 25 cartes d’activités à télécharger »

Les jeux de société coopératifs

Comme le Jeu du verger ou le jeu Parle, écoute, coopère. Idéal pour travailler la coopération à travers la communication et l’écoute.

jeux de société coopératifs

Le verger : on joue tous ensemble pour battre le corbeau ! Les enfants développent leur motricité fine, la reconnaissance des couleurs et leur esprit d’équipe. Produit de grande qualité : des reproductions de fruits en bois massif verni, des petits paniers en osier…

Parle, écoute, coopère : ce coffret de jeu permet de développer la capacité d’écoute active tout en s’amusant. Un joueur choisit une carte de jeu et indique à son équipe les pièces qu’elle doit utiliser (« parle »). Les joueurs doivent écouter attentivement les instructions pour placer sur le plateau les pièces de manière précise (« écoute »). Ils vérifient ensemble que les pièces forment bien la figure de la carte modèle (« coopère »).

Les jeux de construction

Comme les Piks qui permettent de travailler la coopération à travers des activités motrices, de patience et d’équilibre.

jeu de construction

>> Découvrir les cartes créatives Piks

Les mises en scène pédagogiques

Avec les bacs d’exploration qui permettent de travailler ensemble en développant l’imaginaire et la création à travers des scénarios inventés par les élèves.

bac d'exploration

Photo : Méline Dutrievoz

>> À découvrir : 19 idées de bacs d’exploration pour cet été

Les jeux d’adresse et de coordination

Des jeux faciles à mettre en place avec peu de matériel.

jeux d'adresse et de coordination

La coopération au service de l’inclusion

Développer ces compétences chez nos élèves va au-delà de l’espace-classe. Encourager la coopération se révèle également un investissement pour l’avenir, car ce sont des compétences transférables qui permettront à chaque enfant de grandir. Ces compétences prépareront de futurs citoyens respectueux de la différence, enclins à l’entraide, à l’écoute et à la solidarité.

Des compétences au service des élèves à besoins éducatifs particuliers

L’environnement joue un rôle essentiel dans le sentiment de sécurité d’un enfant et dans son attitude au sein du groupe classe. Un enfant en confiance est un enfant qui va développer des comportements adaptés à la vie en groupe. À l’inverse, un enfant « insécure » a plus de risques de développer des comportements irrespectueux, laissant place à la colère ou à l’exclusion de soi ou des autres. Proposer des activités qui font appel à la coopération permet de faire évoluer chaque enfant dans un environnement sécurisant où l’autre n’est ni un ennemi ni un obstacle à son développement personnel, mais bien un partenaire, un co-constructeur d’apprentissages.

En parallèle, encourager les pratiques coopératives au sein de sa classe va permettre à l’enfant porteur de handicap de développer des compétences sociales stables et de déclencher des situations de communication riches et constructives. Ce sentiment d’appartenance au groupe est un des éléments fondateurs d’une école inclusive porteuse de sens.

affiches pour une société inclusive

>> À télécharger : « Inclusion : affichons notre volonté »

Des compétences au service de tous

Les pédagogies coopératives vont permettre de développer chez les élèves des valeurs humaines et humanistes. Apprendre la bienveillance, la tolérance, la patience, l’écoute, l’empathie et la compréhension de l’autre sont autant d’atouts pour faire de ces élèves des êtres sensibles, sensibles à l’autre et à ses besoins. Ces pratiques responsabilisent l’enfant tout en développant une interdépendance positive entre les élèves. Chacun comprenant alors que l’autre est un partenaire d’apprentissage avec lequel il va pouvoir se développer et acquérir de nouveaux savoirs et compétences.
Si chaque élève comprend qu’il a un rôle à jouer au sein de la classe, que son avis compte, qu’il détient un savoir digne d’être partagé, alors il pourra développer une estime de soi forte, une confiance en soi qui deviendra une véritable richesse au quotidien.

>> À lire aussi : « Organiser des ateliers individuels avec les work boxes ? »

Choisir de travailler en classe flexible, c’est recentrer son apprentissage autour des besoins de l’enfant. C’est également, repenser sa pédagogie afin de l’adapter quotidiennement au rythme de chacun. Placer l’élève au centre des apprentissages, l’encourager à s’engager dans des activités coopératives, c’est le fondement même d’une école qui se veut profondément humaniste et inclusive, qui encourage chaque élève à prendre sa place dans le groupe, à mettre son intérêt personnel au profit d’un intérêt collectif, qui permet à tous de s’élever individuellement à travers le bien commun et la communauté qu’est l’École, chacun devenant alors une pièce indispensable au bon fonctionnement de l’ensemble.


Adeline Michel est enseignante depuis 17 ans. Elle a fait la quasi-totalité de sa carrière dans l’enseignement spécialisé (d’abord dans une école de Plein Air, puis dans un dispositif ULIS-école). Adeline est actuellement coordonnatrice dans une ULIS-école du nord-est de la France. Elle a co-écrit deux ouvrages pédagogiques parus aux éditions RETZ : « Enseigner en classe flexible » (avec Anne Larcher, Séverine Walker, Evie Laversanne, Aurélia Onyszko) et « Enseigner en ULIS-école » (avec Fabienne Ramond).

Blog : un-tour-en-ulis.eklablog.com.

La retrouver sur Instagram @un_tour_en_ulis_.

Article publié le 17 août 2020, mis à jour le 24 août 2021

Alexandra Valette, Cheffe de projet communication et influence.

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