Patrice Iacovella est sophrologue, un des rares spécialisé pour les enfants. Patrice est également formateur et intervient régulièrement dans les médias. Papa de deux enfants, il est aussi le créateur des Emoticartes, un jeu ultra innovant destiné à développer l’intelligence émotionnelle. Parce que nous souhaitions vous permettre d’accompagner au mieux les enfants dans ce contexte incertain, angoissant et qui a pu les déstabiliser, nous avons invité Patrice à proposer avec nous un Facebook live, le 17 juin 2020, autour des émotions suscitées par un contexte de crise chez les enfants. En voici ici une synthèse ! 

Sara Garcia et Patrice Iacovella, facebook live du 17 juin 2020
Sara Garcia et Patrice Iacovella, Facebook live du 17 juin 2020

Elles façonnent notre quotidien. Nous en ressentons plus d’une centaine par jour. Elles sont le reflet de notre personnalité et bien souvent elles nous envahissent. Comment aider nos enfants à exprimer leurs émotions ? Comment les aider à les gérer dans un contexte particulier, comme une période de crise ? C’est ce que nous avons demandé à Patrice Iacovella, dont nous retranscrivons ici les propos.

Chaque étape, chaque période de la vie a finalement été un contexte incertain dans lequel il a fallu s’adapter pour arriver à mieux avancer, arriver où nous en sommes aujourd’hui.

Les émotions ont le vent en poupe. Dans notre société et avec l’avènement des neurosciences, nous en entendons beaucoup parler. Mais cela n’a malheureusement pas toujours été le cas. Pour les générations antérieures, le fait d’exprimer ses émotions, de pleurer était mal vu. Dans certaines familles, encore, les émotions sont quelque chose de malsain. Mais il faut penser que les enfants d’aujourd’hui ne sont pas les enfants d’hier. Ils seront par contre les enfants de demain. C’est pour cela qu’il est important de leur donner dès à présent les clés et les outils pour avancer plus sainement et plus sereinement dans la vie, pour en faire des adultes bien dans leur tête, bien dans leur corps et bien dans leurs émotions.

Avec le temps, de nouvelles émotions sont apparues ou se sont renforcées : le stress, la frustration, l’injustice… Jusqu’à arriver à un trop plein d’émotions : le burnout. Nous connaissions le burnout en tant qu’adulte, le burnout professionnel, mais il existe aussi un burnout chez les enfants. Qu’il soit familial ou scolaire, cela peut entrainer des situations difficiles provoquant par exemple des phobies scolaires avec l’impossibilité pour certains d’aller en cours et toutes les conséquences qui vont avec.

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Les émotions, qu’est-ce que c’est ?

Une émotion, c’est une sensation, un ressenti corporel que notre corps va nous transmettre face à une situation. Généralement, une émotion dure de quelques secondes à quelques minutes. Lorsqu’elle dure plus longtemps, de quelques minutes à plusieurs jours, on parle d’un état émotionnel.

La mémoire est liée aux émotions. En tant qu’adulte, nous nous souvenons tous de l’annonce d’une grossesse à notre conjoint, du jour de l’accouchement, de ce qu’il s’est passé, de détails. Lorsque nous étions adolescents ou jeunes adultes, nous nous souvenons des attentats du World Trade Center, d’où nous étions, ce que nous faisions et avec qui lorsque nous avons appris cette nouvelle. C’était un tel cataclysme dans le monde qu’aujourd’hui encore, notre émotion s’est transformée en état émotionnel.

Plus récemment, nous nous souvenons précisément du moment où l’on a compris que la crise sanitaire dans le monde était une pandémie. Nous nous souvenons lorsque le gouvernement nous a annoncé que toutes les écoles, les crèches, les collèges et les lycées seraient fermés pour une durée indéterminée et qu’il serait interdit de sortir.

Il y a eu une explosion d’émotions à tous les niveaux. La joie des enfants s’est vite transformée en colère, il n’y avait pas d’école, mais il y avait toujours les devoirs à la maison. Ce n’était pas compréhensible pour eux. Difficile en effet de faire la distinction entre l’école, les vacances scolaires, et malgré tout encore les devoirs à la maison. Pour nous aussi, en tant qu’adulte, nos émotions n’ont fait qu’évoluer et se transformer durant cette période de confinement, jour après jour, où nous ne savions pas de quoi le lendemain serait fait.

Un homme place un masque sur le visage d'une petite fille.

Quelles sont les trois émotions de bases ?

On parle souvent d’émotions positives ou négatives ; en fait, les émotions ne sont ni positives ni négatives. Elles sont avant tout agréables ou désagréables. Toutes les émotions servent à quelque chose, mais à condition de savoir à quoi. Derrière chacune se cache un besoin et il est important de connaître l’utilité de chaque émotion afin de ne pas se laisser envahir par celle-ci.

La joie

La joie nous envoie un message pour nous dire que quelque chose se passe à merveille, comme nous l’avions prévu. Elle va dégager une forte énergie d’ouverture, avec un besoin de fêter, de célébrer et de partager.

La tristesse

La tristesse est là pour nous indiquer que nous sommes face à un manque, le manque de quelqu’un, le manque de quelque chose. Derrière cette émotion, il y a un besoin de se renfermer, un besoin de s’isoler, peut-être un besoin de parler, de se confier. Dans la tristesse, nous n’avons pas beaucoup d’énergie.

La peur

La peur est là pour nous indiquer que nous sommes face à un danger, un danger qui peut être réel, mais aussi un danger qui, dans 90 % des cas, est imaginaire. Nous imaginons beaucoup de choses qui ne se produiront probablement jamais. Le cerveau ne peut faire la différence entre une peur réelle et une peur irréelle. Dans l’un ou l’autre des cas, il peut réagir de deux manières :

  • La fuite : Le cerveau réagit instantanément en donnant les commandes nécessaires au corps physique afin que ce dernier soit en mesure de faire face à la situation qui représente un danger, une menace.
  • La tétanie : Lorsque la peur est irréelle et qu’il n’y a pas de danger véritable, l’adrénaline n’est pas utilisée par le corps et devient en quelque sorte un poison pour celui-ci, n’étant pas consommée par un effort physique. Le corps n’a alors plus l’énergie nécessaire pour répondre au danger de manière adéquate, et la personne peut être tétanisée ou figée.

Et la colère dans tout ça ?

La colère n’est pas une émotion principale. La colère nous indique que les choses ne se passent pas comme nous l’avions souhaité ou prévu ou que nos valeurs ne sont pas respectées. Derrière chaque colère, il y a souvent beaucoup de peur ou de tristesse.

Prenons l’exemple d’un enfant à qui l’on demande d’arrêter de jouer. Il va se mettre en colère, mais derrière, ce sera la tristesse de devoir cesser une activité qui lui procure du plaisir. Ici, on observe donc que la colère et la tristesse sont étroitement liées.

Souvent, la colère peut être assimilée à l’agressivité. L’image souvent utilisée pour décrire cette émotion est le volcan : une montagne douce et paisible qui renferme quelque chose que l’on ne voit pas, un magma bouillonnant, qui va monter et monter encore jusqu’à exploser de manière irréversible.

Et bien la colère, c’est pareil. De premier abord, tout se passe bien. Puis petit à petit, la colère monte, monte, et monte encore jusqu’à ce qu’elle explose. Il sera alors impossible de calmer cette émotion comme il est impossible d’éteindre la lave qui coule du volcan. La colère va générer une hormone qui s’appelle la dopamine et qui va faire que tout devient explosif.

Toutes les colères sont tolérées, mais pas l’agressivité…

Comment calmer une colère ?

Il est possible d’anticiper le moment de la colère en l’évitant ou en la détournant. On peut aussi apprendre et travailler sur cette émotion grâce à différents outils.

Lorsque la colère survient, qu’elle est irréversible, vous pourrez donner un verre d’eau à votre enfant. C’est une des seules choses qui peut le calmer et l’apaiser dans l’immédiat. Le fait de boire un verre d’eau va disperser et réguler la dopamine. Un neurotransmetteur va alors intervenir à l’intérieur du cerveau qui va faire en sorte que les choses s’apaisent.

>> Lire aussi : L’approche INS dans la gestion de la colère

Durant la période de confinement, étions-nous vraiment à l’écoute de nos émotions et de celles de nos enfants ?

Durant le confinement, il y a eu la peur de l’inconnu et l’incertitude. Les enfants et les parents avaient chacun leurs émotions, mais nous n’avons pas du tout les mêmes langages et nous ne voyons pas les choses de la même manière. En tant qu’adultes, nous entendions des choses, les enfants en entendaient d’autres. Nous comprenions ensemble des choses, mais pas de la même façon. Cette période a été délicate pour tous. Et elle l’est toujours.

Durant cette période, nous avions le même flot d’émotions, mais nous ne parlions pas le même langage émotionnel.

En tant que parents, il était parfois difficile de comprendre ce que ressentaient nos enfants, et nos enfants avaient tout autant de mal à comprendre ce que nous pouvions ressentir. Ils ont entendu beaucoup de choses, ils ont entendu des choses terribles. Et ce qu’il en reste aujourd’hui, ça peut être des peurs : la peur de la maladie, la peur de sortir.

Une des émotions qui est beaucoup ressortie durant ce confinement est la tristesse. Il y a eu de nombreuses violences auxquelles les enfants ont assisté ou dont ils ont été victimes ; des séparations de parents, des décès. Il y a eu également la tristesse de ne plus voir les autres membres de la famille, de ne plus voir ses camarades, de ne plus pouvoir sortir, de ne plus pouvoir pratiquer son activité favorite, et tout cela a souvent engendré beaucoup de colère et d’incompréhension.

Autisme, coronavirus et confinement

Aider son enfant à exprimer son émotion

Accepter ses émotions pour s’épanouir et avancer

Il est important d’aider son enfant à exprimer ses émotions, mais aussi de l’aider à les accepter. Accepter une situation et son ressenti face à celle-ci n’est pas chose facile. Voici deux citations inspirantes sur le sujet :

« Ce à quoi je résiste persiste » : soit, plus je vais résister à quelque chose, à un événement, à une émotion, plus cet événement ou cette émotion va persister et se transformer en état émotionnel. Ce sera alors un lourd bagage, qui sera de plus en plus lourd, et qui finira par craquer.

« Tout ce qui ne s’exprime pas s’imprime » : cela veut sensiblement dire la même chose, tout ce que je ne dis pas va rester à l’intérieur, va être enfoui et refoulé. C’est pour cette raison qu’il est très important de laisser les enfants exprimer leurs émotions et de les encourager à les accepter.

La cocotte des émotions

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Être à l’écoute

La plupart du temps, nous n’écoutons pas nos enfants. Pourtant, les enfants sont des richesses, ils ont des messages à nous transmettre. Sauf que pendant que nos enfants nous parlent, nous sommes déjà en train de penser à ce qu’on va pouvoir leur répondre. Les enfants le ressentent et il est possible que nous passions à côté d’une information importante que notre enfant a à nous dire, ce qui peut créer un conflit. Entendre et écouter, ce n’est pas pareil…

Les émotions et le handicap

Certains enfants ont du mal à exprimer leurs émotions. Notamment les enfants qui ont des troubles verbaux, des troubles de la communication, un handicap mental, des troubles du spectre de l’autisme, des hypersensibilités… Même si l’enfant ne peut exprimer ses émotions, il reste important de le questionner sur ce qu’il ressent. Car cela va générer une certaine réflexion sur les sentiments qu’il ressent.

Un adulte qui tient les mains d'un enfant de façon protectrice.

Être un exemple pour son enfant

Quel meilleur exemple pour son enfant que de lui montrer que nous aussi, en tant que parents, nous pouvons exprimer les émotions que l’on ressent ! Par exemple, le fait d’exprimer notre colère en tant que parent va diminuer celle-ci au fur et à mesure qu’on la verbalisera.

Le lâcher-prise

Prendre du temps pour soi

On parle beaucoup de lâcher prise, et parfois cela paraît compliqué dans certaines situations. Le lâcher-prise, c’est prendre de la distance, c’est prendre un rendez-vous avec soi-même, faire des choses qui nous plaisent. C’est sortir, s’aérer l’esprit, se changer les idées. C’est aussi passer le relais lorsqu’on en ressent le besoin en demandant à notre conjoint, à nos parents, à nos amis, à nos voisins de l’aide pour souffler.

Être dans l’instant présent

Le lâcher-prise, c’est aussi être dans l’instant présent. Mais comment y parvenir ? En sortant, en prenant le temps d’observer ce qu’il y a autour de soi, en travaillant sur les cinq sens, en observant les différentes formes, les différentes couleurs, les différents matériaux. C’est aussi écouter, sentir, toucher… C’est s’habituer à voir le positif pour mieux avancer.

Rester positif

En tant qu’être humain, nous voyons souvent les choses pires qu’elles ne le sont. N’oublions pas que les enfants sont des éponges et qu’ils vont se calquer sur nos habitudes de parents. Par exemple, lors du rituel du soir, avant d’aller se coucher, vous allez pouvoir questionner votre enfant : « Qu’est-ce que tu as le plus aimé dans cette journée ? » ; « Qu’est-ce qui t’a rendu fier aujourd’hui ? ». Vous allez même pouvoir noter ses réponses dans un petit carnet en ajoutant la date de chaque jour. Vous habituerez ainsi votre enfant à voir le positif dans chaque instant. Renforçant sa confiance et son estime tout en l’invitant à lâcher prise et à s’exprimer.

Famille assise devant une maison sur des marches.

>> Téléchargez notre kit des émotions pour une activité autour des émotions avec les enfants

Aider les enfants à exprimer leurs émotions grâce aux Émoti’Cartes

Les Émoticartes sont une gamme de jeux de cartes qui va permettre aux enfants d’exprimer leurs émotions. Mais aussi d’accepter les situations dans lesquelles ils se trouvent, de lâcher prise, de s’habituer à voir le positif en tout ! C’est un jeu qui va pouvoir aider tous les enfants, à partir de six ans, à mieux vivre et exprimer leurs émotions.

Les Émoticartes comprennent un jeu de cartes pour les enfants, qui va les aider à mieux vivre leurs émotions et un autre pour les parents, qui va permettre d’éviter de se laisser submerger par ses émotions de parents et de les transmettre à ses enfants.

stratégies émotions

Les cartes rouges représentent des émotions désagréables et les cartes jaunes, les émotions agréables. Au verso, la définition de l’émotion, de ce à quoi elle sert, de comment on la ressent dans son corps.

Les cartes bleues, quant à elles, sont des cartes ressources avec des petits exercices qui sont basés sur des exercices de sophrologie, de relaxation. Plein d’outils pour permettre à l’enfant d’avoir une clé et une ressource face à certaines situations.

Emoticartes

>> À lire : Comprendre et maitriser ses émotions avec les Émoticartes

Revoir le live

https://www.facebook.com/hoptoys.jeux.jouets.enfant.handicap/videos/2636106776636300/

« Toutes les grandes personnes ont d’abord été des enfants, mais peu d’entre elles s’en souviennent. » Nous tous,  parents, adultes avons été un enfant. Essayons de nous en souvenir et demandons-nous comment aurions-nous vécu cette situation de crise sanitaire ? Comment aurions-nous aimé être accompagnés par nos parents face à cette pandémie ?

Article publié le 19 juin 2020, mis à jour le 18 Janvier 2022

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