Depuis plusieurs années maintenant, les recherches dans le domaine du développement de l’enfant et de l’éducation ont énormément évolué. On repense la place de l’enfant et de l’adulte. On cherche l’épanouissement, le bien-être et l’autonomie de nos bambins. Le travail des professionnels de la petite enfance est par conséquent lui aussi au cœur de ces questionnements ! Depuis très récemment, nous voyons fleurir des crèches adeptes de la pédagogie du free-flow play. Mais alors d’où vient cette nouvelle pédagogie ? Quels en sont les grands principes ? Réponse dans cet article.
Qu’est-ce que le free-flow play ?
Le free-flow play, ou itinérance ludique, est une pédagogie développée par Laurence Rameau, spécialiste de la petite enfance et ancienne directrice de crèche. L’itinérance ludique est le fruit de plusieurs années de recherche et d’expériences. En se basant sur les pédagogies alternatives, les recherches récentes dans le domaine de la petite enfance et des neurosciences, Laurence Rameau a mis au point cette nouvelle approche. Elle place le jeu libre comme un outil au service du développement de l’enfant dans le respect du rythme de chacun.
Particulièrement adaptée aux crèches, l’itinérance ludique repose sur 3 grands principes :
- la libre circulation des enfants dans la crèche,
- la création d’univers ludiques,
- l’enfant auteur de son jeu.
La libre circulation des enfants dans la crèche
Pour Laurence Rameau, il est essentiel de repenser les espaces de la crèche. Celle-ci doit devenir une unité pédagogique ouverte et non plus un lieu divisé en sections. Les enfants et les espaces ne doivent plus être cloisonnés par âge. Chaque enfant doit pouvoir se déplacer librement et, bien évidemment, en sécurité au sein de la crèche. On le laisse explorer son environnement comme il le souhaite, au gré de ses envies. On favorise ainsi les rencontres entre les enfants, mais aussi avec les adultes.
L’enfant est invité à évoluer à son rythme, en respectant ses besoins et son appétence pour le jeu. L’appétence selon l’Académie Française, « désigne une tendance qui porte tout être vers ce qui satisfait ses instincts, ses besoins ». Or, pour un enfant, le jeu représente son point de contact avec le monde qui l’entoure. C’est par le jeu que l’enfant explore, découvre, expérimente, agit sur son environnement. C’est ainsi qu’il comprend les premières lois physiques du monde, mais également les codes sociaux, comment interagir avec les autres. Le jeu favorise sa compréhension de qui il est, de qui sont les autres, dans quel environnement il évolue. En le laissant libre d’explorer, l’enfant s’écoute et va chercher le jeu qui répondra à ses besoins.
>> Pour aller plus loin : l’appétence pour le jeu chez le jeune enfant.
La création d’univers ludiques
Dans le concept d’itinérance ludique, la journée de l’enfant ne s’organise pas autour d’ateliers ou d’activités, mais autour d’univers ludiques. L’idée n’est pas de donner une tâche définie à faire à l’enfant, mais de lui faire des propositions autour de thématiques variées. Ces univers sont pensés par les éducateurs. Ils doivent être variés et accessibles à tous. L’idée est de créer une thématique à travers des objets et des jeux versatiles. L’enfant, libre de se déplacer dans les différents univers, pourra alors s’approprier ces jeux comme il l’entend.
L’objectif n’est pas de leur faire réaliser une production précise que l’on pourra ensuite donner aux parents. L’idée est d‘observer comment chaque enfant s’approprie les propositions. Les attentes ne sont pas figées. Elles permettent donc aux enfants d’explorer tout leur potentiel !
Grâce au principe de la libre circulation, les tout-petits choisissent l’univers qu’ils souhaitent explorer. Ils peuvent le quitter, puis y revenir quand bon leur semble. Et puisque les jouets sont versatiles, ils n’ont pas une seule utilisation possible. C’est à chacun de se les approprier et de leur donner des fonctions différentes.
>> Découvrir les mises en scène pédagogiques
L’enfant auteur de son jeu
Dans le free-flow play, l’enfant est à la fois acteur et auteur de son jeu. En explorant librement, et grâce à la versatilité des objets à sa disposition, c’est lui qui choisit son « programme ». L’adulte ne doit pas dire à l’enfant comment faire, mais il doit mettre en place l’environnement qui lui permettra de faire. C’est le principe de l’affordance.
Le terme affordance est un néologisme qui vient de l’anglais « to afford » qui peut se traduire « offrir », « fournir », « pouvoir se permettre », « procurer/donner l’opportunité de » suivant la façon dont il est employé… Un terme aux multiples sens, donc, très révélateur dans son utilisation en petite enfance. Il permet de mettre en lumière la potentialité, l’accessibilité, l’appel à l’action sur un objet, quelle que soit la façon dont on va procéder pour l’utiliser. Favoriser l’affordance, c’est laisser un enfant explorer tout le potentiel d’un objet sans lui soumettre son utilisation « classique » au quotidien. Autrement dit, c’est lui permettre une découverte sensorimotrice riche en informations, très diversifiée, selon son besoin d’exploration du moment. Le but étant de lui procurer un environnement qui lui donnera envie d’explorer.
Découvrez une explication vidéo du free-flow play dans une crèche :
>> En savoir plus sur l’affordance
Comment mettre en place le free-flow play dans sa crèche ?
Décider de mettre en place cette pédagogie dans sa crèche, c’est amorcer un grand changement. C’est un choix qui devra se faire en équipe. En effet, puisqu’on décloisonne complètement les espaces, le travail ne sera plus du tout individuel, mais en équipe. Il s’agit d’avoir une vision globale sur le développement de l’enfant et sur le fonctionnement de la crèche.
Les différents univers thématiques qui seront créés seront réfléchis et décidés en équipe. Pour fonctionner, il faut qu’il y ait un univers de moins que le nombre total de spécialistes. Ainsi, s’il y a cinq éducateurs et éducatrices travaillant dans la crèche, il y aura alors quatre univers différents. Chacun aura la charge d’un univers et la dernière personne pourra s’occuper des besoins plus pragmatiques : les siestes, les goûters, les changes…
La place de l’adulte
Enfin, c’est surtout le regard sur la place de l’adulte et le développement de l’enfant qui doit être repensé. Il ne doit pas montrer à l’enfant comment faire. Il n’est pas un guide ou un modèle, il est est un accompagnateur. L’adulte est le témoin de l’évolution de l’enfant, de ses expérimentations. Il permet à l’enfant de se sentir en sécurité, et donc d’évoluer librement. Il doit être une valeur ajoutée sur 3 points :
- affective : l’enfant sait qu’il est entouré. On lui montre que l’on est heureux de l’accueillir dans son univers et qu’il peut y évoluer sereinement.
- Cognitive : l’adulte verbalise les actions de l’enfant. Il met des mots sur ce qu’il fait.
- Émotionnelle : en le questionnant sur ce qu’il ressent, on l’aide à identifier et à comprendre ses émotions.
Les crèches ayant adopté l’itinérance ludique ou le free-flow play sont convaincues de ses bienfaits. Les spécialistes observent des progrès très rapides des enfants. La liberté et la confiance qu’on leur accorde leur permet de développer leur plein potentiel. Que pensez-vous de cette pédagogie ? Dites-nous en commentaires !
Sources :
MARCHAL, Laure. L’itinérance ludique : une pédagogie au service des plus petits. Les pros de la petite enfance, 7 décembre 2016.
Le free-flow play : une nouvelle façon de jouer. Les Petits Chaperons Rouges, s.d.
BASSIERE, Nicolas. L’itinérance ludique : qu’est-ce que c’est ? Pim Pam Pomme, 13 juillet 2021.