Hop’Toys a toujours été un fervent défenseur de l’inclusivité. Étant basé à Montpellier, il est tout naturel pour nous de démontrer notre engagement en soutenant des projets locaux. Soutenir l’inclusion fait partie de notre ADN et, pour atteindre cet objectif, nous travaillons en étroite collaboration avec des partenaires locaux déterminés. Parmi eux, l’association L’invisible visible. Fondée par une mère aimante et déterminée, Cathy Cassisa, dont le fils Ilyes, 8 ans, est TSA. Cette association s’est donnée pour mission de rendre les structures et les services accessibles à tous.
Dans cette interview sincère, Cathy partage son parcours. Nous montre comment elle a surmonté les défis avec une détermination inébranlable. Elle nous rappelle que, dans notre quête commune pour un monde plus inclusif, nous ne sommes pas seul. En travaillant ensemble, nous avons le pouvoir de créer un changement significatif, de surmonter les obstacles.
J’estime que l’inclusivité n’est pas une différence ou un préférence, c’est les même droits et la même liberté pour tous, c’est juste que nous, on on doit l’adapter cette liberté, c’est tout.
Le début d’une nouvelle histoire
Le commencement
Au tout début, les premières interrogations ont émergé lorsque mon enfant avait environ un an, il n’émettait pas encore ses premiers mots.
À ce stade, j’étais envahie d’informations, j’ai ressenti une aversion autour de toute ces recherche sur l’autisme, craignant que cela ne crée une distance entre mon fils et moi.
Les attentes et les inquiétudes des autres concernant le développement de notre enfant ont pesé lourdement sur nous. Avant même que nous commencions à nous inquiéter, de nombreuses personnes avaient des opinions préconçues. On nous disait ce qu’il « devrait » faire, ceci où cela, que son babillage était insuffisant, etc.
Pour la petite anecdote, pendant cette période, je me suis retrouvée à changer sa couche plus de 40 fois par jour, car cela me semblait crucial. À l’époque, je ne comprenais pas pleinement pourquoi c’était si important pour moi. Je n’avais pas les codes pour communiquer avec lui, mais inconsciemment, je réalisais que ces moments étaient des interactions, des moments de communication où j’obtenais son regard et son sourire. Inconsciemment, j’ai commencé à privilégier ces moments, car c’était là que je me sentais connectée à lui.
C’est seulement après le diagnostic, lors de discussions avec des professionnels, que j’ai réalisé que ces moments où je changeais sa couche étaient effectivement des instants privilégiés de connexion avec mon enfant.
Les inquiétudes d’une mère
On pourrait dire que mes inquiétudes ont commencé lorsque personne d’autre ne semblait s’en préoccuper. Elles se sont apaisées lorsque tous mes proches ont commencé à partager ces préoccupations. Nous étions conscients que tous les enfants passent par différentes étapes de développement mais, emplis d’une certaine intuition, nous avons entamé le processus de diagnostic.
L’anxiété devenait écrasante, alimentée par une surconsommation d’informations sur Internet. J’ai décidé de mettre un terme à cette recherche incessante. Mon objectif était d’attendre le diagnostic et de profiter de mon enfant en attendant.
À ce stade, j’étais envahie d’informations, j’ai ressenti une aversion envers tous ses termes médicaux et celui d’autiste, craignant que cela ne crée une distance entre mon fils et moi.
Le diagnostic
Le diagnostic a été établi relativement rapidement, grâce à la pédiatre qui nous suivait et à une visite opportune au service adéquat. Le processus a débuté au centre de ressources, où nous avons rencontré une pédopsychiatre. Elle a recueilli toutes les informations nécessaires avant de procéder à un bilan approfondi. À ce stade, des soupçons étaient déjà présents. Environ deux jours d’évaluations plus tard, c’est la même pédopsychiatre qui a officialisé le diagnostic.
Ce dénouement est très vite devenu la clé d’une nouvelle étape, offrant une compréhension et une prise en charge accrues pour notre enfant. Je sais que, pour beaucoup de parents, c’est le soulagement, mais c’est important de nuancer ce sentiment. Certes, le diagnostic apporte des réponses, mais concrètement, il nous confronte à un nouveau monde. Les professionnels nous guident sur la manière d’interagir et et de faire évoluer nos enfants, ce qui peut être très perturbant, et il faut faire le deuil de cette idée de la vie parfaite qu’on s’imaginait pour notre enfant.
En fin de compte, c’est un processus d’acceptation où l’on apprend à laisser notre enfant vivre sa propre vie, même si cela diffère de nos idéaux.
« Assieds-toi et laisse-le vivre comme il doit vivre » – un enseignement précieux.
Le diagnostic a renforcé ma conviction que je prenais les bonnes décisions, même si cela impliquait de suivre des professionnels et des séances ou prise en charge éducative auprès des professionnels.
La réaction des proches
La plupart de mes proches ont été d’une grande compréhension, mais au fil du temps, j’ai malheureusement perdu la plupart de mes amis.
Les liens avec mes amis ont subi des bouleversements en raison de la présence de mon enfant en situation de handicap. Certains se sont éloignés, peut-être par manque de compréhension ou simplement parce que cela exigeait davantage d’énergie de leur part. Je ne leur en veux pas, car je sais que les gens peuvent se sentir désemparés face aux handicaps et ne savent pas toujours comment réagir.
Un exemple concret de cette réalité, c’est un peu comme quand vous avez un bébé et que vos amis, eux, sont toujours célibataires et sans enfants. Vous partagez des photos de votre enfant, mais leur enthousiasme ne semble pas toujours au même niveau que le vôtre. Ils ne sont pas aussi captivés par les petits détails, et c’est normal, je réalise que cela fait partie de notre humanité.
Il est fréquent que les gens ressentent une gêne face au handicap, surtout s’ils n’ont pas été personnellement touchés par la situation. Savoir comment réagir peut être un véritable défi, car certains craignent de dire quelque chose de maladroit. Pourtant, il est crucial de ne pas éviter le sujet du handicap. Être un soutien pour une personne en situation de handicap implique simplement de lui montrer que l’on est là, sans pour autant la traiter comme un enfant.
Je comprends parfaitement que l’autisme puisse susciter un certain malaise. Avant le diagnostic de mon fils, je me rappelle avoir ressenti de l’embarras en présence de personnes en situation de handicap. C’était un territoire inconnu pour moi, et je ne savais tout simplement pas comment réagir.
Comment réagir de la meilleure des manières ?
Une anecdote m’a marquée, et je vais m’en servir pour illustrer mon propos sur ce sujet. Un jour, j’ai vu un homme en fauteuil roulant qui allait se retrouver bloqué sur le trottoir à cause d’une poubelle gênante. J’ai directement voulu l’aider ! Mais je savais aussi que je ne voulais pas l’infantiliser. J’ai donc été décaler la poubelle mais, en le faisant, j’ai précisé avec un ton chaleureux que je savais qu’il pouvait le faire seul, mais que cela arrangeait tout le monde, donc je l’ai fait ! Il s’est avéré que mon aide l’a fait rire, créant ainsi un moment de connexion humaine.
La clé pour aider les personnes en situation de handicap est d’être là pour elles, de les soutenir et de les considérer comme des individus uniques.
En créant cette nouvelle vie, la réaction commune face au diagnostic est souvent de chercher un coupable, comme je l’ai expliqué dans mon livre. Les facteurs inconnus peuvent facilement conduire à cette recherche de responsabilité. Certains blâment le père ou la mère, et certaines familles se divisent au cours de cette première année. La réalité est complexe.
Chacun est différent et chaque situation nécessite une approche individuelle pour comprendre et soutenir au mieux son enfant. Plutôt que de chercher un coupable, il est essentiel de se concentrer sur la compréhension de son enfant et sur la manière de l’aider à progresser. Chacun doit suivre son propre chemin pour comprendre et soutenir son enfant, car il n’y a pas de règles strictes, il faut faire ce qui fonctionne le mieux.
Finalement, j’ai décidé de me concentrer sur mon fils et de travailler sur sa communication et sociabilisation. L’objectif était de lui permettre d’exprimer ses besoins et de mieux comprendre le monde qui l’entoure. Cela a été un voyage intense, mais extrêmement gratifiant.
Le handicap, l’inclusion, des sujets sensibles ?
Je crois que c’est important de briser les tabous et de permettre aux gens de se sentir à l’aise pour discuter de ces questions, même si cela peut sembler délicat au départ. En tant que mère, j’ai rencontré des défis uniques liés au handicap de mon enfant, et j’ai appris à gérer les réactions des autres.
Le soutien des proches
L’entourage familial et amical revêt une importance cruciale dans ces moments difficiles, et il est primordial de cultiver un espace où chacun se sent en confiance pour partager ses préoccupations, que celles-ci soient liées au handicap ou à d’autres aspects de la vie. C’est de cette manière que nous pouvons progresser ensemble et surmonter les obstacles qui se dressent sur notre parcours.
J’espère que ma propre expérience peut contribuer à sensibiliser davantage les gens à la réalité des personnes en situation de handicap et à encourager des échanges ouverts et respectueux à ce sujet. Il est facile de se montrer égocentrique et de se focaliser sur nos propres soucis. Parfois, nous hésitons à partager nos préoccupations, pensant qu’elles paraissent mineures comparées à celles d’autrui. Il est pourtant crucial de se rappeler que chacun porte ses propres fardeaux, et nos préoccupations ont leur importance à notre échelle.
À titre d’exemple, je traverse actuellement des difficultés liées à des problèmes dentaires d’Ilyes, avec une prise en charge et un suivi complexe, mais cela ne devrait pas m’empêcher de partager mes inquiétudes avec autrui. Je comprends toutefois que les gens puissent se sentir mal à l’aise à l’idée d’aborder des sujets dit délicats, tels que le handicap.
En définitive, nous devons cultiver une écoute mutuelle , partager nos préoccupations, même si elles semblent moins pressantes que celles des autres, et instaurer un environnement propice à l’expression de chacun. C’est ainsi que nous pourrons nous soutenir mutuellement de manière plus efficace et affronter ensemble les défis de la vie.
Une anecdote marquante ?
En tant que maman, je voulais maintenir une certaine continuité dans sa vie même si je rencontrais des difficultés. Je n’avais pas encore le diagnostic et pourtant c’était une période où je m’efforçais de reproduire des routines, que ce soit pour les heures de coucher ou même pour les prises de biberon.
À l’époque, je ne comprenais pas vraiment pourquoi je faisais tout cela. Pourquoi je m’attachais autant à une routine stricte ? La notion de routine était quelque chose de surprenant pour moi. Je me rappelle avoir laissé mon petit dans son parc pendant de longues périodes, même lorsqu’il a commencé à ramper. Je ne comprenais pas vraiment pourquoi je faisais ces choix.
Lorsque j’ai finalement obtenu le diagnostic d’autisme pour mon fils, beaucoup de choses ont commencé à s’éclairer. J’ai réalisé que ces routines strictes et ces choix particuliers étaient en quelque sorte une réponse à ses besoins. Le parc était un lieu où il se sentait en sécurité, où il pouvait mieux gérer son environnement.
Il est étonnant de voir comment notre instinct maternel peut influencer nos actions, même lorsque nous ne comprenons pas entièrement pourquoi nous faisons certaines choses. On pense souvent que l’instinct, l’amour maternel et la prise en charge peuvent sembler incompatibles mais, en réalité, ce ne sont que des outils pour aider. Notre instinct maternel est toujours présent, et nous faisons des choses de manière naturelle sans même nous en rendre compte.
La découverte de la bienveillance d’autrui
Si je dois parler d’un souvenir marquant, je dirais Marineland. Quelques années en arrière, je me suis vue offrir un week-end au Marineland par la direction du site, avec mon enfant, à une période difficile pour moi. Cette expérience m’a profondément touchée, bouleversée au moment où j’en avais le plus besoin.
Ce moment a été décisif. Il m’a conduit à rechercher des solutions spécifiques pour les enfants autistes dans le milieu du divertissement. Cela m’a également montré que la visibilité du handicap et la sensibilisation jouaient un rôle essentiel dans la prise en charge. Je me suis donc premièrement concentrée sur la sensibilisation et la compréhension du public.
Ces personnes m’ont montré que la bienveillance existait toujours et que, si elle pouvait être manquante quelque part, elle pouvait être trouvée ailleurs. Cela m’a poussée à sensibiliser les autres et à œuvrer en faveur du changement.
Pourquoi avoir créer une association engagée pour l’inclusion ?
J’ai compris que l’existence de personnes bienveillantes ne suffisait pas à changer le système à chaque fois. Mon fils a rencontré de nombreux défis. Notamment lors de ses trajets en tramway pour se rendre au centre de loisirs, en raison de ses sensibilités sensorielles. J’ai réalisé que le système de transport en commun ne prenait pas en compte les besoins des personnes autistes. Cette prise de conscience m’a incitée à chercher des solutions plus larges et à œuvrer pour un changement systémique.
J’ai dû choisir entre me battre constamment pour sensibiliser les autres passagers ou trouver des solutions pour que mon fils puisse vivre cette difficulté de manière plus sereine. On a opté pour la deuxième option, malgré les défis émotionnels et grâce au lien fort qui nous unissait. J’ai alors exploré des alternatives, comme solliciter un transport spécifique, mais j’ai découvert que l’autisme n’était pas pris en compte dans les critères de prise en charge du handicap.
Finalement, le moment où j’ai créé l’association a été influencé par le besoin de lutter pour l’équité et l’harmonie. J’ai constaté que certaines règles étaient injustes et inappropriées. Comme dans mon cas où la première crèche d’Ilyes appliquait des règles différentes uniquement pour mon fils. Il était temps de prendre des mesures plus concrètes pour moi et de créer mon association. Mais je voulais qu’elle soit vraiment utile. L’association a un objectif de sensibilisation mais surtout d’action. Je voulais pouvoir offrir autre chose à mon fils.
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Un autre projet qui t’a aidé à te lancer ?
J’ai aussi commencé à défendre cette cause avec les ateliers d’immersion sensoriels projet de réalité virtuelle (VR). Le projet consiste à rendre accessible à tous la sensibilisation immersive par le biais de casque VR, en créant un scénario permettant à l’enfant ou l’adulte d’accepter plus facilement le soin. Cela permet aussi d’apporter des opportunités de compréhension, d’action sur les lieux du quotidien, d’emploi, de scolarisation. Pour concrétiser cette idée, la création d’une association était la première étape. Initialement axée sur la sensibilisation, l’association a évolué naturellement pour englober d’autres projets, dont l’évolution de l’accueil adapté et inclusif à la zone Odysseum.
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D’où tires-tu cette force ?
Quant à ma force émotionnelle, je ne considère jamais l’échec comme une option. Si la première solution n’est pas viable, je m’engage à trouver une alternative. J’éloigne les sentiments de colère et laisse place à la bienveillance et ses opportunités.
En dehors de l’association, je reste profondément engagée dans la cause de l’autisme. J’admire également les actions des autres dans ce domaine. Notamment en ce qui concerne les problèmes liés aux transports. J’ai récemment eu un rendez-vous avec la mairie et travaille en collaboration avec eux pour faire avancer les choses. Mon objectif, c’est que des changements concrets se produisent dans un délai raisonnable. Et je suis déterminée à poursuivre cet engagement pour mon fils et pour la cause.
J’évoque souvent l’importance de ne pas attendre ! En soulignant que, si je ne peux pas mettre en œuvre une solution aujourd’hui, je m’efforcerai de trouver une alternative demain. Mon objectif est de montrer l’exemple à Montpellier, de rendre la ville plus inclusive, et ainsi inspirer d’autres localités. J’insiste sur le fait que généraliser l’inclusion partout c’est la clé pour démontrer que c’est possible pour tous de vivre ainsi.
Mon fils, Ilyes, occupe une place spéciale dans cette lutte. Il est ma « mascotte », toujours présent lors des événements. Son soutien émotionnel est crucial pour moi. Notre relation souligne l’importance de l’inclusion à tous les niveaux.
Un message à diffuser ?
En résumé, mon engagement inébranlable en faveur de l’inclusion se manifeste à travers divers projets et partenariats. Je cherche à montrer l’exemple, à inspirer le changement ! Et, bien sûr, à intégrer mon fils dans ce combat pour un monde plus inclusif. Et je tiens à dire qu’on est tous capable de le faire, il suffit de se lancer ! Si vous avez besoin d’inspiration ou si vous vous posez des questions, n’hésitez pas à contacter Hop’Toys où moi-même via mon site l’invisible visible.
Cathy Cassisa – Fondatrice et présidente de l’invisible visible
Site internet : l’invisible visible