Le concept de qualité de vie est présenté comme essentiel pour penser l’accompagnement des personnes en situation de handicap. En effet, améliorer la qualité de vie est un objectif du quotidien. En ce sens, le concept intègre de plus en plus de politiques publiques, de projets de service et de revendications d’organisations de défense des droits (Brown et al., 2013). Dans cet article, retrouvez un éclairage sur le sujet avec Hélène Geurts, docteure en sciences psychologiques et de l’éducation.
Qu’est-ce que le concept de qualité de vie ?
À titre d’exemple, initialement pensé comme une notion de sensibilisation, il est désormais plébiscité comme un concept mesurable qui pourrait fournir un cadre à la mise en œuvre de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes en situation de handicap (Lombardi et al., 2019). Nous sommes donc tous concernés, quelle que soit notre profession, peu importe notre rôle, car nous partageons ce vocabulaire et cet objectif. Qui ne souhaiterait pas s’engager dans cette direction ? Cependant, si la qualité de vie semble être, à première vue, un concept simple à comprendre, définir ce dernier s’est avéré une tâche bien plus compliquée que prévu. Or, sans définition, il est quasiment impossible de mettre en pratique. Au sein de cet article, nous reviendrons sur trois définitions associées au concept de sorte à mieux en esquisser les contours.
Comment définir le concept de qualité de vie ?
Pour une première définition, nous vous invitons à vous projeter le 31 décembre, à 23h59. Vous vous apprêtez sûrement à formuler vos vœux pour la nouvelle année. Santé, amour… La liste peut être longue. À cet égard, Anne Fagot-Largeault (1991), psychiatre française et Professeure au Collège de France, affirme que « la qualité de vie, sous l’angle individuel, c’est ce qu’on se souhaite au nouvel an : non pas la simple survie, mais ce qui fait la vie bonne – santé, amour, succès, confort, jouissances – bref, le bonheur ». On comprend dès lors que la qualité de vie s’associe à de l’épanouissement personnel, ce dernier étant tributaire de plusieurs dimensions. Mais quelles sont les dimensions permettant unanimement de donner sens au concept ? Quels sont les indicateurs acceptés de tous permettant de mesurer la notion ?
À l’échelle internationale, l’Organisation Mondiale de la Santé a apporté d’importantes contributions dans la définition du concept. Ainsi, l’OMS (WHOQOL, 1995) présente la qualité de vie comme :
La perception qu’ont les individus de leur position dans la vie dans le contexte de la culture et des systèmes de valeurs dans lesquels ils vivent et par rapport à leurs objectifs, attentes, normes et préoccupations .
Qu’est-ce cette définition démontre ?
Cette définition démontre la subjectivité du processus profondément marqué par le contexte, mais surtout par les aspirations personnelles. Ai-je accompli les objectifs qui me tiennent à cœur ? Plusieurs dimensions constitueraient cette bonne vie et peut-être y trouverez-vous vos catégories de vœux pour le nouvel an. Ainsi, la qualité de vie serait affectée par la satisfaction relative à la santé physique, à la santé psychologique, au niveau d’indépendance témoigné dans le quotidien, aux liens noués avec autrui, aux croyances personnelles ainsi qu’aux relations établies avec son environnement (sécurité, revenus…). Mais qu’en est-il pour les personnes en situation de handicap ? Nos vœux seraient-ils tributaires du diagnostic ?
Et dans le domaine du handicap ?
Plusieurs modèles ont étudié le concept de qualité de vie dans le domaine du handicap et, plus particulièrement, celui de la déficience intellectuelle. Dans le cadre de cet article, nous parlerons des travaux les plus connus, à savoir ceux de Schalock et Verdugo (2002).
Un premier principe consiste en le fait que la notion est composée des mêmes facteurs et relations, que l’on présente ou non un handicap. Toutefois, si l’OMS mentionne six dimensions à la qualité de vie, Schalock et Verdugo en identifient huit :
- le bien-être émotionnel
- le bien-être physique et matériel
- les relations interpersonnelles
- le développement personnel
- les droits
- l’autodétermination
- l’inclusion sociale.
Travailler une dimension aurait un impact sur le concept global. Par ailleurs, en mettant à l’étude le modèle, on remarque que certains facteurs personnels et environnementaux prédisent fortement la qualité de vie des usagers. Ainsi, le diagnostic est le principal prédicteur des scores de qualité de vie. Avoir une déficience intellectuelle entraînerait, en moyenne, une plus faible qualité de vie. Néanmoins, ce n’est pas uniquement le diagnostic en soi qui joue, mais plutôt la manière dont les services accompagnent les besoins des usagers.
De fait, il apparaît que la qualité de vie est tributaire des conditions de vie et de l’accès effectif à une société inclusive (Simões & Santos, 2016). Quel regard je porte sur le handicap ? Quels rôles je confie à la personne que j’accompagne ? Quelle place est-elle laissée à sa parole ? Comment l’environnement est-il rendu accessible ?
Voilà autant de questions et de pistes personnelles de réponse qui confirment le fait que nous soyons tous concernés par ce défi de promouvoir cette « vie bonne ». Rien pour nous sans nous… et surtout tous ensemble !
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Retrouvez son intervention lors du Congrès de l’Unapei 2022 :
Ressources :
Brown, I., Hatton, C. & Emerson, E. (2013). Quality of life indicators for individuals with intellectual disabilities: extending current practice. Intellectual and developmental disabilities, 51(5), 316–332. https://doi.org/10.1352/1934-9556-51.5.316.
Fagot-Largeault, A. (1991). Réflexions sur la notion de qualité de vie. Archives de Philosophie du Droit, 36, 135-153.
Lombardi, M., Vandenbussche, H., Claes, C., Schalock, R., De Maeyer, J. & Vandevelde, S. (2019). The concept of quality of life as framework for implementing the UNCRPD. Policy and practice in intellectual disabilites, 16(3), 180-190. https://doi.org/10.1111/jppi.12279.
Schalock, R. L. & Verdugo, M.A. (2002). Handbook on quality of life for human service providers. DC: American Association on Intellectual and Developmental Disabilities.
Simões, C. & Santos, S. (2016). Predictors of Quality of Life of Persons with Intellectual Disability. En ligne : https://www.aaidd.org/docs/default-source/default-document-library/predictors-of-quality-of-life-of-persons-with-intellectual-disability.pdf.
WHOQOL Group. (1995). The World Health Organization Quality of Life Assessment (WHOQOL): Position paper from the World Health Organization. Social Science and Medicine, 41(10), 1403-1409.
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Hélène Geurts est titulaire d’un doctorat en sciences psychologiques et de l’éducation qu’elle a obtenu à l’UMONS. Elle donne des cours au sein du service d’orthopédagogie clinique et contribue à des recherches portant sur la promotion de l’autodétermination et de la qualité de vie des personnes en situation de handicap pour une société plus inclusive. Retrouvez Hélène sur son compte Linkedin : helenegeurts