17e Colloque d’ACFOS intitulé : « Les enfants sourds en 2021 : quels projets, quels besoins ? ». Nous étions partenaire de cet évènement. Ces deux journées ont regroupé plus de 300 personnes. Le public était composé de familles, de professionnels de la surdité, mais aussi de professionnels de la petite enfance. Dans cet article, Clara Legendre, orthophoniste, nous apporte des éléments de réponse concernant les besoins du bébé sourd.

L’importance du dépistage néonatal de la surdité

Depuis la loi sur le dépistage néonatal de la surdité de 2012, la surdité est dépistée et diagnostiquée plus précocement.  

C’est dès le diagnostic avéré que le médecin ORL coordonne avec la famille la mise en place d’un accompagnement adapté à l’enfant auprès d’un réseau pluridisciplinaire de professionnels, qui sera ajusté en fonction des différents besoins de chaque enfant. L’appareillage est proposé plus précocement, dès 3 à 6 mois de vie. L’accompagnement parental et le suivi orthophonique se mettent en place dès le diagnostic posé et ce, quel que soit le degré de surdité. 

Un bébé est allongé et sa maman lui tient les mains

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Si le gain auditif apporté par les prothèses conventionnelles n’est pas suffisant, l’implantation cochléaire peut être proposée à la famille dès l’âge de 12 mois selon le choix de celle-ci (HAS, 2009). Un bilan pluridisciplinaire pré-implantation sera proposé dans un centre pédiatrique hospitalier d’implantation cochléaire. 

Un accompagnement précoce autour du bébé sourd

Le bébé sourd, comme tout bébé, est une personne douée d’intentionnalité et de communication. Il communique durant ses premiers mois de vie par des pleurs, des cris, le babillage, l’activité motrice, le regard… Ces prérequis à la communication constituent le terreau essentiel à l’entrée dans la langue et s’appuient sur l’audition. Ces compétences sont à soutenir et entretenir. Pourquoi ? Pour favoriser l’émergence de l’entrée dans le sens et dans la langue, quel que soit le choix linguistique de la famille. Sans stimulations adaptées, ces compétences pré-langagières peuvent s’amoindrir, voire s’effacer, et donc altérer le développement cognitif et social du bébé.

L’entrée auditive est essentielle pour le développement langagier et apprendre à écouter soutient le développement de la parole et du langage. La réhabilitation auditive est alors essentielle, en lien avec un accompagnement parental pour mieux appréhender la surdité de l’enfant, ses répercussions au quotidien et son impact sur le développement linguistique.  

L’audition sera au cœur des interventions proposées (éducation auditive) pour développer les compétences perceptives du très jeune enfant sourd, à l’aide de différents jeux, de bruits, d’onomatopées, de moments partagés et de situations d’interaction en fonction de l’âge de développement de l’enfant et de ses centres d’intérêt. Des gestes, mimiques seront associés et des aides à la communication (Langue française Parlé Complété, gestes…) pourront être proposées en fonction du choix linguistique opéré par la famille. On peut proposer des jeux comme les animaux de la ferme pour les onomatopées, des instruments de musique pour stimuler l’audition ou encore des jouets sonores.

Un papa joue de la musique pour son bébé

Ces compétences et habiletés se construisent en lien avec l’environnement dans lequel l’enfant évolue. Ainsi, le bébé se nourrit des échanges et interactions auxquels il participe précocement. 

Les prérequis à la communication sont des compétences précoces à valoriser pour tous les bébés, et encore plus chez le bébé sourd.  

La place centrale de la famille

Le rôle de l’intervention précoce auprès d’un bébé sourd et de sa famille est de permettre dans la grande majorité des cas de faire émerger et/ou de valoriser les compétences de communication et langagière de l’enfant. Cet accompagnement familial se développera dans un environnement bienveillant, soutenant et étayant pour la famille. Le but est de favoriser la richesse des interactions au quotidien. Les jeux, mais aussi les livres sont des outils utilisés par tous et à valoriser auprès des familles en veillant au plaisir partagé. Les compétences prélinguistiques, puis linguistiques sont soutenues en fonction de l’âge de développement du bébé et plus tard avec l’enfant, en fonction de ses centres d’intérêts. 

Un travail préventif des troubles linguistiques qui peuvent s’ajouter à la surdité est également mis en place. Il s’appuie sur des objectifs en orthophonie précis et individualisés qui sont réajustés, en fonction des progrès ou des difficultés rencontré(e)s par chaque bébé sourd. 

Le projet individualisé sera discuté et construit avec la famille. Le choix de la langue sera réalisé par la famille, sur la base d’une information éclairée donnée par les différents partenaires : associations, réseaux de parents… et professionnels (HAS, 2009). 

Un bébé sourd et ses parents jouent ensemble

Un suivi orthophonique sera proposé pour accompagner le développement du langage. En fonction du degré de surdité, le suivi orthophonique sera ajusté sur la base d’une évaluation étalonnée. Plus la réhabilitation auditive est rapidement ajustée et efficace et plus l’enfant développera une communication adaptée, permettant l’émergence d’un langage et d’une parole qualitativement proches de ses pairs entendants. 

La famille est un relais essentiel et d’autres professionnels pourront être sollicités si des besoins spécifiques sont relevés. 

L’enfant sourd et la scolarisation

Depuis la loi sur l’égalité des chances du 11 février 2005, le droit à l’éducation pour tous les enfants est un droit fondamental. L’école doit s’ajuster aux besoins spécifiques de chaque enfant. 

L’intégration des enfants sourds a été portée par différentes structures et établissements spécialisés, depuis plusieurs décennies maintenant. L’inclusion scolaire des enfants sourds nécessite une connaissance des besoins et des réalités que peuvent engendrer une surdité : difficultés perceptives dans le bruit, difficultés lexicales ou pragmatiques en lien avec le niveau de langue…  

Un groupe d'élèves dans une aire de jeux

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Un nombre croissant d’enfants sourds sont scolarisés en inclusion avec ou sans aide spécifique, avec un accompagnement spécifique ou non, soutenus par un service de soins, ou bien par un réseau de professionnels en libéral. Un accompagnement est indispensable pour évaluer les besoins de chaque enfant à des moments clés (entrée à l’école maternelle, entrée dans l’écrit, début de collège et de lycée) et favoriser une inclusion réussie. 

Il n’existe pas un seul profil d’enfant sourd !

Ces deux journées ont fait ressortir l’importance d’informer et de former les différents professionnels qui interviennent auprès de chaque enfant sourd en fonction des offres de soins et des diversités rencontrées sur le territoire. Des défis restent à relever. 

Des familles et jeunes sourds ont témoigné de leur parcours personnel. 

Quelques outils

Supports et aides pour faciliter et entraîner la communication avec bébé sourd

100 idees pour communiquer en français avec un enfant sourd : Cet ouvrage permet d’envisager un autre regard sur l’éducation du jeune sourd. Il met en évidence que la seule déficience auditive ne fait pas du jeune sourd un être à part. L’enfant sourd lui peut vivre une vie ordinaire au milieu des siens, à l’école, dans ses loisirs avec plaisir et partage. Il s’adresse aux parents, aux professionnels, aux enseignants qui souhaitent mener le jeune vers une réelle autonomie. Comment ? En lui offrant une communication orale aisée et efficace.

ABC… LSF : Initialement conçu pour les sourds, ce dictionnaire visuel bilingue s’avère rapidement indispensable à tous. De format confortable, ce livre est clair grâce à une illustration des signes très complète. Comprend 2600 concepts, 3200 mots et un index alphabétique pour une recherche rapide.

Avez-vous un enfant sourd depuis la naissance ? En accompagnez-vous dans votre vie professionnelle ? N’hésitez pas à partager vos conseils en commentaires ! 

Article publié le 7 février 2022. Mis à jour le 9 mars 2022.


ACFOS (Action Connaissance Formation pour la Surdité) est une association spécialisée sur la surdité congénitale ou acquise durant l’enfance.
Les actions concernent principalement la diffusion des connaissances sur la surdité de l’enfant (prise en charge, conséquences…) et la formation des professionnels.

Alexandra Valette, Cheffe de projet communication et influence.

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