Que peut apporter la pratique de la sophrologie pour une personne avec une dyslexie ? Qu’est-ce qu’une dyslexie ? Que peut apporter la sophrologie sur le plan de la confiance en soi et de la réussite ? Pour répondre à ses questions, nous avons donné la parole à Nicolas Chaze, orthophoniste et sophrologue, qui associe ces deux pratiques.
Qu’est-ce que la dyslexie ?
La dyslexie est un trouble spécifique d’apprentissage de la lecture d’origine développementale et qui apparaît chez des enfants sans trouble sensoriel (visuel ou auditif) ni déficit intellectuel. Il est indépendant du contexte éducatif, social ou psycho-affectif de l’enfant. Nous estimons que 5 à 10 % des enfants scolarisés présentent une dyslexie, souvent plus fréquente chez les garçons. Nous notons dans 70 % des cas des difficultés au niveau du langage écrit dans la famille.
Diagnostic d’une dyslexie
Son diagnostic est posé après une évaluation effectuée par un orthophoniste et d’éventuels bilans pluridisciplinaires (psychologue, psychomotricien…). Établi le plus précocement possible, il intervient souvent après deux ans d’apprentissage de la lecture. La dyslexie est souvent associée à des troubles spécifiques des apprentissages qualifiés de troubles « DYS » (dysphasie, dysorthographie, dyscalculie, dyspraxie…). Généralement, les repérages dans le temps et l’espace sont instables, la construction du schéma corporel est incomplète, la latéralisation incertaine. Nous notons parfois une agitation motrice, une motricité fine imprécise, des difficultés d’attention, de mémorisation, des confusions pour les lettres et les sons proches. S’y ajoutent une lenteur et une fatigabilité, des difficultés dans la mémorisation et la compréhension des supports écrits.
>> À télécharger : les troubles Dys et la dyspraxie en une infographie !
La dyslexie et les compétences affectives
Les personnes dyslexiques éprouvent des problèmes affectifs en réaction à leurs difficultés : manque de confiance, perte de l’estime de soi, anxiété de performance, rejet de la lecture… L’élève s’investit difficilement à l’école et ressent une aversion pour tout type d’écrit. Touchant 6 % d’une même classe d’âge et très fréquents, ces troubles influent sur la réussite scolaire, l’intégration socioprofessionnelle. Ils nécessitent des suivis spécifiques et des ajustements pédagogiques.
En quoi la sophrologie peut-elle aider un enfant dyslexique ?
La sophrologie, associée aux rééducations habituelles (orthophonie, psychomotricité, ergothérapie…), offre à l’enfant dyslexique, la possibilité d’installer un changement durable dans la compensation de ses difficultés, de développer une meilleure confiance en lui.
Se réapproprier son schéma corporel
Elle fournit l’opportunité à l’enfant de se réapproprier son schéma corporel en lien avec l’espace et le temps. Il apprend progressivement à être dans l’ici et maintenant. La sophrologie permet de prendre conscience des tensions, des crispations et mouvements parasites souvent présents lors des situations de lecture et d’apprentissage. Elle offre la possibilité de se détendre et de favoriser le ressenti de sensations agréables de plaisir en lien avec la respiration. Avec les enfants et les adolescents, les exercices, pratiqués initialement en position assise puis debout, favorisent l’intégration de repères dans le temps et l’espace.
L’appropriation de ces exercices et leur utilisation en toute autonomie ne peut se faire que par la répétition. Ils favorisent le développement de la perception du corps dans toutes ses dimensions en les unifiant. Ils replacent le corps et le ressenti au cœur des apprentissages, vécus comme « scolaires » et donc dissociés de la vie quotidienne. Cette appropriation influe positivement sur la motricité, la latéralisation, l’orientation dans le temps, l’espace, la motricité fine (graphisme et écriture).
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Développer ses capacités d’apprentissage et de mémorisation
En stimulant spécifiquement les cinq sens, l’information est perçue de manière plus optimale, pouvant entraîner une compensation des difficultés portant sur les confusions auditives et visuelles. L’objectif final est de renforcer la présence, la disponibilité pour mobiliser de façon plus efficace ses capacités d’apprentissage et de mémorisation.
Cela peut amener une diminution de la fatigabilité, une amélioration de l’attention. Par les techniques de visualisation, la personne se représente plus finement les informations à retenir pour les intégrer aisément et durablement. Cette manière originale d’aborder la lecture et les apprentissages permet de développer d’autres stratégies de compensation et une nouvelle motivation.
Que peut apporter la sophrologie sur le plan de la confiance en soi et de la réussite ?
La sophrologie peut aider la personne dyslexique à exprimer son vécu, ses ressentis souvent négatifs vis-à-vis de la lecture et des apprentissages. La répétition quotidienne de situations d’échec induit un manque d’assurance, de confiance en soi. La personne se sent dévalorisée par rapport aux autres personnes du même âge dont elle subit parfois le regard et même les moqueries. L’anticipation négative de ces situations ou d’un événement plus particulier (examen, évaluation) est abordée pour s’y préparer mentalement.
Envisager un scénario plus positif
Elle prend conscience des pensées négatives parfois récurrentes et envahissantes qui peuvent se manifester avant où lors de ces situations. Elle utilise des techniques de visualisation pour les aborder de manière plus sereine en envisageant un scénario plus positif de leur déroulement, en l’intégrant progressivement dans son quotidien. La sophrologie réduit peu à peu l’anxiété de performance, la peur de l’échec. La personne renforce l’estime de soi, en stimulant les structures saines de la personnalité, en observant comment elles s’expriment en situation de réussite. Valorisées et développées, elles enrichissent des structures moins performantes. Ces situations de réussite, permettent à la personne de retrouver confiance dans ses capacités, de trouver une nouvelle motivation, d’engendrer un véritable « cercle vertueux ».
Compenser ses difficultés et être plus autonome
Cela le conduit, par la répétition à l’application d’exercices en situation réelle, à une plus grande autonomie dans la compensation de ses difficultés. Ce même processus est utilisé pour développer d’autres capacités lors de situations d’apprentissage qui habituellement sont difficilement vécues. La sophrologie offre donc la possibilité, en impliquant le corps, le mouvement et la respiration ainsi que les visualisations, d’apprendre à gérer stress et anxiété et d’exprimer ses émotions. Elle permet de renforcer les capacités les plus efficientes de la personne pour la replacer en situation de réussite.
L’entraînement sophrologique n’est pas centré sur le symptôme (dyslexie), contrairement à d’autres approches plus spécialisées, médicales ou paramédicales. Elle redonne à l’individu sa place de sujet, accueilli et respecté dans sa globalité qui n’est plus seulement un « dyslexique », présentant un trouble à compenser, à réparer. Elle permet une alliance thérapeutique, une relation particulière avec le·la thérapeute, car il pratique parfois en même temps que le consultant les exercices, pour les lui montrer et en favoriser l’intégration.
Devenant un acteur des différentes prises en charge dont il n’était parfois que l’objet, le sujet développe une implication et une autonomie nouvelles. Il porte un regard différent sur lui-même, ses capacités et compétences. La sophrologie s’avère un complément de choix dans l’accompagnent de personnes présentant des troubles spécifiques des apprentissages. Permettant une approche globale de la personne, elle prend en compte toutes ses dimensions.
Nicolas CHAZE est orthophoniste depuis 24 ans et sophrologue depuis 10 ans. Il a développé son expérience en cabinet libéral et en institution (IME, ITEP…). Il a enseigné à Lyon durant six ans durant la formation initiale des orthophonistes. Diplômé de l’Institut Sophrologie Rhône-Alpes (Lyon), il propose un accompagnement individuel, mais aussi en groupe auprès d’enfants et d’adultes au sein de son cabinet à Bollène.
Les séances proposées concernent les problématiques liées à la gestion du stress (Burn-Out), la gestion des émotions, du sommeil, les pathologies chroniques, les troubles du sommeil, les phobies (phobie scolaire), la réussite professionnelle et scolaire. Il propose par ailleurs des pratiques spécifiques aux troubles Dys (dyslexie, dysorthographie…), au handicap mental (trisomie, autisme), au bégaiement, aux troubles de la voix, aux pathologies neurodégénératives (Alzheimer, Parkinson…).
Nicolas est l’auteur de l’ouvrage « 100 idées pour proposer la sophrologie aux enfants Dys » paru en 2016 aux éditions Tom Pousse. Il écrit régulièrement des articles traitant des troubles des apprentissages et troubles Dys dans le magazine « Sophrologie Pratique & Perspectives ». Et il est co-créateur depuis 2008 d’une formation spécifique à propos des troubles Dys (SophroDys®), destinée aux sophrologues. Il anime sur Facebook le groupe « Sophrodys » traitant des troubles Dys et de la Sophrologie et un groupe « Orthophonie et qualité de vie » destiné à prévenir et accompagner les situations d’épuisement professionnel.
Sites internet : www.sophrologique.com / Sophrodys
Groupes FB : SophroDys