À l’occasion du mois de sensibilisation à l’autisme, nous avons eu le plaisir de vous proposer un nouveau Live, jeudi 8 avril 2021, sur notre page Facebook. Pendant une heure de discussion en ligne, Cécile Martignac, cofondatrice et dirigeante de la Meex (Maison des enfants extraordinaires) et Nicolas Lebas, psychomotricien, nous ont parlé des particularités neurodéveloppementales et sensorielles de l’enfant ayant des troubles autistiques (TSA).
Les intervenants sur la compréhension neurodéveloppementale
Cécile Martignac est co-fondatrice et directrice de la Meex, la Maison des enfants extraordinaires et elle est également la maman de deux enfants Extraordinaires de 9 et 12 ans. La MEEX accompagne les enfants en difficulté d’apprentissage et leurs familles et propose un très riche et très innovant programme de formation aux professionnels.
Nicolas Lebas est psychomotricien, co-fondateur de la MEEX et coordinateur du pôle enfant. Formé aux approches sensori-motrices et d’intégration neurosensorielle, il exerce également en libéral.
La pyramide des apprentissages
La pyramide des apprentissages, « the pyramid of learning » de Mary Sue Williams et de Sherry Shellenberger, est une excellente base sur laquelle s’est beaucoup appuyée Cécile pour comprendre les comportements de son fils.
Cette pyramide est une association de briques. C’est une intégration progressive par le système nerveux central de tout un tas de données. Le système nerveux central, c’est le cerveau. Au fur et à mesure de l’expérience, du mouvement, du développement de l’enfant, des connexions se créent au sein du cerveau. Ces connexions vont s’établir au fur et à mesure et permettre de maitriser la motricité, de maitriser les informations sensorielles que l’on reçoit, pour interpréter, comprendre et organiser des réponses pour agir sur l’environnement. Le haut de la pyramide représente les comportements visibles et le bas toutes les compétences sous-jacentes qui sont le reflet de ses comportements.
De ce fait, si on a des connexions entre certaines zones du cerveau qui ne sont pas suffisamment efficaces, on va avoir des comportements qui vont être perturbés, gênés pour que l’enfant puisse fonctionner de façon la plus optimale possible.
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Est-ce que cette pyramide change au moment de l’adolescence ?
Cette pyramide est en mouvement toute la vie. Il y a bien sûr des périodes un peu phare comme l’adolescence où il y a beaucoup de changements corporels et des préoccupations nouvelles. C’est une période assez sensible où il faut d’autant plus prendre le temps d’évaluer les besoins pour le quotidien et les besoins du corps pour continuer à nourrir la connaissance que l’adolescence a de ses systèmes sensoriels. Nicolas conseille donc que l’adolescent.e bouge, pratique une activité physique par exemple. Il préconise également d’utiliser les outils qui fonctionnaient lorsqu’il était plus jeune s’il y a des petits retours en arrière sur cette période. Si nécessaire, n’hésitez pas à vous entourer de personnes de confiance afin de réfléchir à ses besoins et à les organiser dans son quotidien avec lui.
Vous pouvez par exemple lui proposer ce que Cécile appelle des « portes de sortie » en cas de surcharge sensorielle ou émotionnelle. Cela peut être d’aller s’isoler, de faire du trampoline, de porter des vêtements de compression ou lestés…
>> À lire aussi : « Autisme et puberté : 11 conseils pour les parents »
L’autisme, un trouble du neurodéveloppement
Cette pyramide permet de mieux comprendre les troubles du spectre autistique, car c’est une approche par étapes du développement de l’enfant. La base de la pyramide représente la naissance. Lorsque l’enfant atteint la zone en vert, c’est le début des apprentissages préscolaires et scolaires. Quand on parle de trouble, c’est qu’une brique n’est pas suffisamment intégrée par le système nerveux ou qu’une connexion entre deux briques (ou plus) ne se fait pas correctement.
Bien que tous les enfants soient uniques, certains dysfonctionnements sont plus fréquents en cas d’autisme. Les enfants TSA sont gênés dans leurs comportements visibles pour interagir avec leur environnement et être autonomes. Ils ont également des particularités sensorielles. Il est plus difficile pour eux de sentir, comprendre et organiser à partir des informations sensorielles qu’ils reçoivent. Ils ont des difficultés à filtrer les informations et cela peut les mettre en surcharge sensorielle, les empêcher de rassembler les informations nécessaires à la compréhension d’une situation et ainsi pouvoir organiser une réponse.
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Les difficultés d’intégration sensorielle
Les personnes ayant des particularités sensorielles réagissent très fortement à certaines stimulations sensorielles même lorsque celles-ci sont faibles. Ils vont avoir une sensibilité exacerbée, cela va exciter le système nerveux qui va générer du stress. Les personnes avec une hypersensibilité sensorielle vont donc éviter ou fuir ces situations. C’est un comportement indépendant de leur volonté, qui n’est pas dirigé contre les parents ou éducateurs pour « embêter » et ce ne sont pas des caprices. Les enfants font de leur mieux avec leurs moyens et présentent donc des difficultés d’intégration sensorielle.
Il va donc falloir qu’on les aide à développer leurs ressources, qu’on aménage leur environnement afin qu’il facilite des comportements adaptés et positifs sources d’apprentissage. En tant que parents, en tant qu’accompagnant, il faut rechercher les compétences sous-jacentes qu’on peut stimuler, qu’on peut prendre en compte pour accompagner au mieux l’enfant à développer ses ressources.
>> À lire aussi : « Hypersensibilité, quand la sensorialité est intense »
Cas pratique : un enfant qui cherche à tourner
Par exemple, on a un enfant qui aime et cherche à tourner sur lui-même que ce soit sur un tabouret ou debout. On va donc chercher à savoir quel est le système sensoriel qui est impliqué dans ce comportement. Ici, on va penser au système vestibulaire qui est lié à l’équilibre qui nous permet de comprendre dans quelle direction le corps se déplace et nous permet d’ajuster notre posture pour garder de la stabilité. Le récepteur sensoriel du système vestibulaire est dans l’oreille interne.
Cet enfant qui tourne fréquemment et avec une haute intensité est plutôt dans une recherche de sensations. Pour que le cerveau puisse prendre en compte cette information, il lui faut une grande dose d’information. Intuitivement, l’enfant sait ou se trouve son besoin. On va aller dans le sens de son besoin et si ce comportement pose problème dans certaines situations, on va tâcher qu’il y ait recours moins fréquemment ou avec moins d’intensité en organisant des situations de jeux où il sera actif et pourra stimuler son système sensoriel. Progressivement, on peut espérer que l’enfant est moins besoin de solliciter ce système et ces comportements.
>> À lire aussi : « Identifier les troubles d’intégration sensorielle »
Un accompagnement conjoint pour faire évoluer l’enfant
On peut travailler ce seuil sensoriel petit à petit en aménageant l’environnement, en évitant certaines situations. On va dans le sens de ce qu’il aime pour travailler le plaisir d’écouter, de regarder, d’apprendre à discriminer les sons. Plus ils grandissent, plus on peut s’appuyer sur leur conscience de leur réalité et de leurs besoins lorsque cela est possible. Lorsque l’enfant est non verbale et a des difficultés importantes de communication, la compréhension de ses besoins se fera alors via une observation fine de ses comportements.
L’accompagnement conjoint de la famille, des professionnels de santé et d’éducation est très important afin d’adapter l’environnement et avoir des attitudes cohérentes. Pour ne pas travailler tout à la fois, il est important d’avoir des objectifs clairs, précis à court terme et décidés en équipe multidisciplinaire afin d’évaluer l’impact des interventions et voir si l’enfant évolue dans ses apprentissages.
Les personnes-ressources sont là pour aider les enfants à se réguler lorsqu’ils ne sont pas tout à fait autonomes, les encourager, les aider à prioriser là où ils doivent donner de l’énergie.
Avoir une grille de lecture commune, ici la pyramide des apprentissages, permet à toute l’équipe ressource et aux parents d’avoir la même vision, les mêmes objectifs. Selon Nicolas et Cécile, il est important aussi de valoriser ce qui fonctionne bien et de fêter les objectifs atteints avant de fixer un nouvel objectif.
Stratégies d’aménagement de l’environnement d’un point de vue sensoriel
Il existe des outils et solutions à mettre en place à l’école, en centre, à la maison (partout !) pour « traiter » l’environnement d’un point de vue sensoriel.
Par exemple, pour les enfants qui sont gênés par la lumière, on peut mettre des filtres pour atténuer l’intensité de l’ampoule.
Pour les enfants qui sont vite surchargés visuellement, on peut réduire l’environnement visuel en le structurant un peu plus. Par exemple avec une barrière pop-up.
Pour les enfants qui sont en recherche de mouvements, on peut essayer de faire travailler l’enfant debout ou avec une assise dynamique.
>> À lire aussi : « S’inspirer de l’INS à la maison »
En savoir plus sur l’intégration sensorielle
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Notre livre blanc est préfacé par Isabelle Babington, ergothérapeute et formatrice en INS, co-fondatrice de la Meex et auteure de l’ouvrage L’enfant extraordinaire, comprendre et accompagner les troubles des apprentissages et du comportement grâce à l’intégration neurosensorielle, éditions Eyrolles.